À 25 ans, Tarik Zakaria Benmerar, encore étudiant à l'Université des sciences et technologies Houari-Boumediène, où il s'occupe d'un club scientifique qu'il a fondé, comptabilise déjà plusieurs années d'expérience professionnelle. Comment fait-il ? À l'époque où on voit des milliers de diplômés courir derrière les plus brèves expériences dans le monde du travail, lui, sur son profil Linkedin, où il affiche un bon CV, il en a partout… pas étonné du tout, il ne se considère pas comme faisant partie de l'exception… “Tout le monde fait ça aujourd'hui”, dit-il le plus naturellement du monde. “ça”, c'est créer des entreprises dans le monde à partir de son ordinateur. Liberté : Encore étudiant à l'université de Bab Ezzouar et vous dirigez déjà votre propre entreprise ? Tarik Zakaria Benmerar : Oui, je suis inscrit en doctorat LMD en informatique à Bab Ezzouar spécialité réseaux et systèmes distribués et je fais de la recherche, mon entreprise porte le nom Acigna qui veut dire “cloud” en anglais ou nuage en français, c'est par rapport au cloud computing… D'habitude on voit les initiales Sarl ou Eurl devant les noms d'entreprises algériennes, sur votre carte on lit plutôt Acigna Inc ! Normal, puisque je l'ai créée aux USA. J'ai fait les papiers là-bas par l'intermédiaire d'agences qui simplifient les démarches, il suffit juste d'avoir un peu d'argent Combien ? Moi j'ai mis 525 dollars, auxquels il faut ajouter chaque année des taxes versées aux USA et il y a aussi un numéro EIN à se procurer (identifiant de la taxe fédérale), que je n'ai pas encore. J'ai créé l'entreprise d'abord pour avoir un nom et le faire connaître. Quelles agences ? Elles sont connues dans les milieux des étudiants… comme freelancer.com ou Odesk.com (ces derniers exigent le EIN). Après il suffit de chercher des jobpost où les employeurs permettent le travail à distance… D'ailleurs le travail à distance est devenu une culture… Vous faites quoi dans votre entreprise ? Pour l'instant on fait de la sous-traitance pour des clients aux USA qui ont des projets informatiques, en offshore, c'est-à-dire, ils sont aux USA, moi je travaille pour eux à partir de l'Algérie, en ce moment principalement pour une entreprise de VoiP “Intelechoice.us”, ils ont un site web basé sur les technologies Python/Django, mon boulot c'est d'enlever les bugs, d'arranger son code source… Cela fait une année que je travaille pour cette entreprise et mon contrat a été renouvelé… C'est bien payé ? l On peut entrer dans le détail (rien)… environ 600 DA l'heure mais je veux négocier une augmentation… À une époque, je me faisais quatre briques par mois (40 000 DA) mais en ce moment c'est un peu en baisse… Mais je suis confiant, un peu de persévérance et je pourrais la faire monter à nouveau… C'est quoi le mode de payement ? Si je passe par la banque, exemple CPA, je sors mon argent au taux officiel (environs 1 pour 75) mais si j'arrive à avoir directement les devises je passe par le taux au noir et là c'est beaucoup plus avantageux… Il faut trouver quelqu'un qui les ramène… mais de toute façon je suis très bien payé par rapport aux boulots que je peux trouver en Algérie. Et le volume horaire ? Par exemple pour atteindre les 30 000 DA, il me suffit de travailler 6 heures par semaine comptabilisée par un logiciel… En réalité c'est pas très dur… mais je dois être aux aguets quand même, j'ai une réputation à défendre, s'il y a des bugs et je ne suis pas présent ça me cause préjudice pour plus tard. Pourquoi ne pas créer une entreprise en Algérie ? C'est un projet que j'ai proposé aux Start-up Weekend pour l'intégrer dans les programmes de l'incubateur étatique du Cyberparc de Sidi Abdellah, afin de développer des entreprises spécialisées dans la sous-traitance informatique offshore avec des solutions de payement adaptées, c'est-à-dire une plateforme de gestion de projet qui aide les entreprises à gérer leur temps et leur tâche, plus la mise en place d'un moyen de payement adéquat et le plus important c'est de créer un service qui aborde le marché international… mais l'idée n'a pas été retenue. J'avoue aussi qu'il y a des craintes quant à la création d'entreprise en Algérie, par rapport aux impôts et autres démarches bancaires, c'est pour cela que j'ai choisi d'essayer de passer par cet incubateur. Autres activités ? Je suis cofondateur du club openmindstuds.com qui fait la promotion des logiciels open source… On organise pour le grand public ce qu'on appelle les Linux Install Party, où on fait découvrir à ceux qui veulent le système d'exploitation Linux et d'autres logiciels libres dans tous les domaines. Autres projets ? Un projet open source pour ceux qui publient des cours et exercices sur le web. Je compte aussi organiser un atelier pour initier au langage Python. Y. H.