Résumé : Nazim se rappelle tout à coup de son accident et de Feriel. Il sursaute à cette évocation. Sa fiancée était-elle en vie ? Il tente de se relever, mais ne put pas. Un infirmier vint l'aider à se rallonger et lui apprend que la jeune fille était indemne et avait quitté l'hôpital le jour même. Au fait quel jour était-on ? Il avait perdu la notion du temps. Il ne savait pas depuis combien de temps il était dans cet hôpital et sur ce lit. Tant pis. Demain il demandera tous les détails au docteur Nabil. Ce dernier lui plaisait bien. Il parlait avec sagesse et semblait connaître son métier. Nazim reste ainsi un long moment à méditer sur son sort avant de sombrer dans un sommeil profond et bienfaisant et cette fois-ci sans sédatif. Il lui sembla avoir vécu une éternité, alors qu'il se réveillait des heures plus tard. En fait, c'était une voix de femme qui l'avait tiré de son sommeil. La voix d'une jeune femme en pleurs. Il n'eut aucun mal d'ailleurs à reconnaître la voix de sa sœur Nadia. Une autre voix lui demandait de se calmer ou de sortir de la chambre. Mais sa sœur continuait sur sa lancée, et cette fois-ci il entendit des sanglots et des paroles qui lui glacèrent les os : - Mon Dieu… Ce n'est pas vrai ! Nazim, mon frère, était si beau, si charmant. Ne me dites pas docteur qu'il ne va plus avoir de visage. Même pas quelques traits qui nous rappelleront le bel homme qu'il avait toujours été jusque-là. Le médecin garde le silence. Une manière de marquer son impuissance devant un tel cas. Nadia reprit sa litanie. Une autre voix s'ajoutera à la sienne. La voix de Meriem. C'était la benjamine. Meriem paraissait plus calme et, tout comme sa mère, elle s'en remettait à Dieu. - Nous devrions accepter ce coup du sort Nadia. Nous n'avons pas le choix. Remercions le Très-Haut que notre frère soit encore en vie. - Mais dans quel état ?, s'écrie Nadia d'une voix rageuse. Je… je ne sais pas comment il va réagir quand il saura qu'il n'a plus de visage, mais moi, je lui souhaiterais de mourir au plus tôt, car tel que je connais Nazim, il n'est pas évident qu'il accepte ce coup du sort dont tu parles ! La voix du Dr Nabil s'élève enfin telle une pluie sur un incendie : - Détrompez-vous. Nazim est bien plus fort que vous ne le croyez. Il est intelligent et saura surmonter l'épreuve sans trop de mal. En fait, la véritable beauté ne réside pas dans le physique, mais plutôt dans l'âme. Et à ce que je comprends, Nazim n'en est pas dépourvu. Il saura vite accepter son sort et je l'aiderais de mon mieux à reprendre goût à la vie. Il ne faut surtout pas lui faire sentir l'intensité de votre détresse… Votre maman semble bien plus courageuse. Nadia se calme et Meriem demande : - Que pourrions-nous faire docteur pour atténuer ses souffrances morales ? - Ne jamais lui faire sentir qu'il n'est plus comme avant. Nazim restera à vos yeux tel que vous l'avez toujours connu… Heu… Je n'aimerais pas être indiscret, mais ne croyez-vous pas que la présence de sa fiancée serait d'une aide précieuse ? Nadia qui avait cessé de pleurer s'empresse de répondre : - Feriel a quitté l'hôpital depuis plus de vingt-quatre heures sans même passer le voir. - Elle est passée la veille, et nous avons discuté longuement ensemble. Elle semblait ébranlée. Mais ce que je n'arrive pas à saisir, c'est ce départ précipité, sans un petit regard vers Nazim. D'après ses dires, ils étaient sur le point de se marier. - Oui docteur, mais après ce qui vient d'arriver, ce mariage est forcément remis en cause. - Hum… Pourquoi dites-vous cela ? Peut-être que Feriel est encore sous le choc et finira par se montrer. - Feriel est une fille pourrie, gâtée, elle ne reviendra jamais vers quelqu'un qui n'a plus les traits du beau gosse qu'elle avait connu. Elle était si fière de l'exhiber tel un trophée devant ses amis… Elle pousse un soupir : - Nazim l'a aveuglement aimée… Il était prêt à se sacrifier pour elle… Le docteur Nabil ne répondit pas. Il avait rencontré tout au long de sa carrière plus d'une situation similaire et savait que, dans de tels cas, il y avait toujours un perdant. Les deux sœurs demeurèrent encore un moment au chevet de leur frère, avant de se décider à rentrer. (À suivre) Y. H.