Le nouveau gouvernement marocain n'a pas perdu de temps pour nouer le contact avec Alger afin d'améliorer les relations bilatérales, sur lesquelles il mise beaucoup, car une réouverture des frontières entre les deux pays lui sera bénéfique. Acceptera-t-il de régler tous les différends en suspens comme le préconise l'Algérie ? Accompagné d'une importante délégation de son département, le nouveau chef de la diplomatie marocaine, Saâd-Eddine El-Othmani, entamera aujourd'hui une visite en Algérie qui, selon un communiqué de son ministère, “s'inscrit dans le cadre de la consolidation du processus des rencontres et des concertations entamé par les deux pays pour hisser leurs relations au niveau des aspirations des deux peuples frères”. Ceci n'est que le côté classique de cette visite que le nouveau gouvernement marocain n'a pas tardé à organiser afin d'atteindre ses objectifs, et dont la réouverture de la frontière demeure la priorité absolue dans le but d'améliorer le quotidien de la population du Maroc oriental pénalisée depuis qu'Alger a décidé de fermer la frontière terrestre en 1994. Ainsi, il ne fait aucun doute que Saâd-Eddine El-Othmani fera le maximum pour convaincre ses interlocuteurs algériens, notamment le président Bouteflika qui le recevra à l'occasion, de faire un geste en ce sens. D'ailleurs, le Premier ministre marocain fait d'un rapprochement avec l'Algérie une priorité, car l'estimant nécessaire pour résoudre le problème du Sahara occidental, comme en témoigne sa déclaration. “Si nos différends avec l'Algérie sont réglés avec l'ouverture des frontières, le problème du Sahara sera résolu. La fraternité avec l'Algérie résoudra tous les problèmes.” Reste à savoir si l'Algérie, qui préconise un traitement global des contentieux existants entre les deux pays, l'entendra de cette oreille. Pour rappel, l'ancien ministre de l'Intérieur algérien, Noureddine Yazid Zerhouni, avait indiqué en avril 2008 au sujet de la réouverture des frontières que l'Algérie “tient à traiter cette question dans un cadre global et non comme un point isolé”. Il appartient donc au gouvernement d'Abdelilah Benkirane d'accepter de traiter tous les contentieux en suspens entre les deux pays, à commencer par cette histoire de ratification du traité sur le tracé des frontières, ratifié par le Président et adopté par le Parlement algérien, mais bloqué au Maroc qui, après ratification par le Premier ministre, n'a pas fait l'objet d'adoption au Parlement. Il y a également la question des Algériens résidant au Maroc, spoliés de leurs terres en 1973 sans qu'ils ne soient indemnisés comme les autres étrangers dans le même cas. Aujourd'hui, il faut soit leur restituer leurs terres, soit leur verser des indemnités, parce qu'il s'agit de montants conséquents. Halim Benatallah, secrétaire d'Etat algérien auprès du ministre des Affaires étrangères, Halim Benatallah, chargé de la Communauté nationale à l'étranger, avait rouvert ce dossier au mois d'août, lors d'une visite à Oujda et Berkane, indiquant que “la question des ressortissants algériens établis au Maroc dépossédés de leurs terres agricoles, représentant des centaines d'hectares et non indemnisés est au centre des préoccupations du gouvernement algérien”. Depuis c'est le silence radio du côté de Rabat. Le Maroc devra aussi faire un effort pour mettre un terme au trafic de drogue en provenance de son territoire vers l'Algérie, laquelle est inondée de ce poison en dépit de la fermeture des frontières, et de la vigilance des services de sécurité algériens. Il est donc temps pour le Maroc de faire un effort en acceptant de discuter et de trouver des solutions à tous les contentieux en suspens avec l'Algérie, en laissant l'ONU se charger du conflit du Sahara occidental. C'est la seule manière de sortir du cercle vicieux dans lequel sont plongées les relations algéro-marocaines depuis l'accession de l'Algérie à l'Indépendance en 1962. M T