Résumé : Saïd demande à son beau-frère de travailler à Alger ou d'emmener sa famille à Constantine. Nadia n'intervient pas lors de leur conversation. Cependant, quand elle demande à Ghania de rester avec lui, il n'apprécie pas. Il ne lui dit rien, mais elle le sent. Nadia ignore si c'est par crainte ou un acte volontaire de son mari mais il revient travailler à Alger. Il a moins de responsabilités, donc plus de temps libre. Nadia l'encourage à donner des cours de soutien. Elle sait qu'il s'est habitué à un autre rythme de vie et elle redoute qu'il le regrette. S'il s'ennuie. - Je n'ai pas quitté l'enseignement pour donner des cours privés, lui dit-il. Non, plus jamais ! - Alors que feras-tu ? - Je vais proposer mes services à un journal comme pigiste. Je travaillerais quand j'en aurais le temps. Je crois que c'est l'unique domaine où je ne pourrais pas m'ennuyer ! Nadia veut bien le croire. L'avenir lui paraît moins sombre depuis son retour. Saïd a gardé un œil sur son ménage, et elle sait que si Omar était resté à Constantine, son frère n'aurait pas hésité à le chercher. Il l'aurait ramené, même à coups de pied. Si elle le pense, et elle en est persuadée, c'est parce qu'il le lui a dit. Saïd, malgré son jeune âge, n'a pas l'habitude de parler pour rien. Et il est buté. - Qu'est-ce qu'il fait maintenant ? - Il va travailler pour un journal, lui apprend-elle. A l'occasion. Saïd a un drôle de regard. Il grimage beaucoup plus qu'il ne sourit. - Journaliste ? Et encore ? - Rien, pourquoi es-tu aussi sec ? J'ai parfois l'impression que tu n'aimes plus mon mari, remarque-t-elle. Aurais-tu une raison précise ? - Non mais il a manqué à ses devoirs. Il lui reste à faire ses preuves maintenant ! - Il est là, c'est la preuve qu'il tient à nous, insiste-t-elle. Ou parles-tu d'autres preuves ? Saïd a haussé les épaules et a mis fin à leur conversation en partant. Nadia aurait voulu le retenir pour avoir des nouvelles de Ghania. Le téléphone est toujours en dérangement, et Nadia n'a pas encore eu le temps d'aller la voir depuis qu'elle a accepté de vivre avec leur jeune frère. Nadia voudrait savoir si Ghania tient le coup. Omar sort toujours après avoir ramené Aziza de l'école. Il ne reste pas discuter avec elle. Il a toujours un rendez-vous ou un article à écrire. Il lui manque. Même s'il lui est affectueux. Elle se sent oppressée tant elle a le cœur lourd. Avant de perdre ses parents, Nadia s'est toujours confiée à eux. Maintenant, elle n'a plus personne, et cela l'attriste. Si elle avait pu, après le travail, elle se serait rendue à Belcourt pour voir Ghania. Malika habite loin d'elles et, n'étant pas véhiculée, elle ne vient les voir qu'occasionnellement. Nadia ne lui en veut pas, mais depuis la mort brutale de leurs parents, elles ne se sont pas retrouvées. Quelques semaines ont passé, et comme elle est toujours sans nouvelles de sa sœur aînée Ghania et de leur frère Saïd, elle demande à son responsable de pouvoir prendre un après-midi. Elle prétexte être souffrante. - Je vais voir mon médecin traitant, ment-elle. - Allez-y ! Ne vous en faites pas. Nadia ne tarde pas. Elle range son bureau, prend ses affaires et part à Belcourt. Sa sœur Ghania est heureuse de la voir. Nadia remarque ses yeux larmoyants et sa mine fatiguée. Elle devine que par sa faute, elle lui fait endurer le pire. Ghania n'est plus jeune et ce ne doit pas être facile de vivre avec Saïd. - As-tu eu le temps de déjeuner ? lui demande-t-elle en la précédant à la cuisine. J'ai préparé un plat que tu aimes bien ! - Du choux farci ! C'est à croire que tu as pressenti ma visite, dit Nadia en s'asseyant à la table pour être servie. Merci ! Ghania la laisse manger tranquillement et profite de cet instant pour étendre le linge dehors. Nadia qui la suit du regard note qu'il n'y a aucun habit de leur frère. Lorsque Ghania revient, elle lui demande pourquoi. - C'est à croire qu'il ne vit pas ici. Il n'y a même pas une chaussette à lui dans tout le linge lavé en machine, lui fait-elle remarquer. Tu les as lavés avant ? - Hélas non, dit Ghania. Saïd ne veut pas que je touche à ses affaires, à sa chambre. Je ne réponds pas au téléphone, il le garde dans sa chambre. Il y a des fois où il ne mange pas ce que je cuisine ! Il y a des jours et des nuits où il ne rentre pas ! - Il les passe où ? Ghania l'ignore. Son frère l'inquiète beaucoup ces derniers temps. (À suivre) A. K. [email protected]