« Renforcer l'unité nationale pour faire face aux défis et aux campagnes haineuses contre l'Algérie »    Epreuves restreignant la dynamique associative en Algérie    Président du parti vainqueur des législatives au Danemark : « Le Groenland n'est pas à vendre »    «LG Evening Care» Le nouveau service après-vente en soirée    Introduction officielle de la BDL à la Bourse d'Alger    Suspension de l'aide militaire pour l'Ukraine    La famine risque de s'étendre dans tout le pays    Poutine : « La Russie doit chasser l'Ukraine de la région de Koursk dans les plus brefs délais »    Les leaders pour creuser l'écart, chaudes empoignades dans la lutte pour le maintien    Walid Sadi : «Mon élection au Comité exécutif est un acquis pour toute l'Algérie»    Walid Sadi élu à la CAF    Saisie de 448 kilogrammes de viandes rouges et blanches impropres à la consommation    Journée nationale des personnes aux besoins spécifiques : expositions et distribution d'appareillages    Jalousement préservées par les habitants du Ksar de Tiout    Il y a 11 ans, disparaissait l'icône, Na Cherifa    L'ambassade du Japon présente « I LOVE SUSHI »    Beihdja Rahal fête ses 30 ans de carrière Deux concerts exceptionnels à Alger et Constantine    Grande mosquée de Paris : la tolérance en islam et le soutien au peuple palestinien au cœur du prêche du vendredi    Blida: MM. Hidaoui et Ouadah coprésident une cérémonie de distinction des lauréates du concours "Femmes entrepreneures à succès"    Constantine: "Enafka", une tradition ancestrale consacrant l'esprit de solidarité à la mi-Ramadhan    Le rôle de l'Algérie dans la promotion de la paix et de la sécurité salué par une responsable parlementaire mexicaine    Athlétisme / Mondiaux 2025 en salle : Chenitef, seul représentant algérien à Nanjing    Un syndicaliste espagnol avertit contre les atteintes aux droits humains au Sahara occidental    La Radio Algérie internationale célèbre la Journée nationale de la culture palestinienne    L'occupant sioniste multiplie ses agressions contre les mosquées en Cisjordanie pendant le mois sacré    Saisie de 1.7 million de comprimés psychotropes à In Amenas    ACNOA: ouverture des travaux de la 22e assemblée générale de l'instance africaine à Alger    Le président de la CAF félicite M. Sadi pour son élection au Comité exécutif de l'instance africaine    Hidaoui souligne l'importance de moderniser les établissements de jeunes pour davantage d'attractivité    Impératif d'accélérer les procédures nécessaires à la création d'une société spécialisée dans le transport aérien domestique    17ème colloque des Dourouss Mohammadia à Oran: Le soufisme en Algérie a eu un grand impact dans l'immunisation de la société    Les responsables de la "Chemiserie Djen-Djen" appelés à proposer un modèle standardisé de tabliers d'écoliers    Le président de la République félicite le président de la Commission de l'UA à l'occasion de sa prise de fonctions    Renouvellement par moitié des membres du Conseil de la nation: la Cour constitutionnelle annonce les résultats définitifs ce jeudi    Le 6e Festival de la chanson andalouse de jeunesse s'ouvre à Alger    La Défense nationale plébiscite l'Algérie au rang des nations victorieuses        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



“LA LANGUE FRANÇAISE VUE DE LA MéDITERRANEE” DE PATRICE MARTIN ET CHRISTOPHE DREVET
Choix ou fatalité ?
Publié dans Liberté le 25 - 01 - 2012

L'ouvrage s'intéresse aux différentes représentations que se font les écrivains du pourtour de la Méditerranée de la langue française, de leurs langues maternelles et de leur manière de se projeter dans l'écriture, en faisant le choix d'une langue.
En Algérie, nous avons usé jusqu'à la corde l'aphorisme – plus célèbre que son œuvre – de Kateb Yacine, selon lequel “la langue française est un butin de guerre”. Il est donc souvent très difficile d'entretenir des rapports sereins avec cette langue que nous pratiquons – même dans notre vie de tous les jours – compte tenu de la manière dont elle s'est répandue chez nous : par le biais de la colonisation.
à cette situation plutôt douloureuse – et outre la langue maternelle des Algériens (le dialecte algérien “dardja” et le berbère) – s'ajoute une langue arabe dite classique enseignée avec archaïsme et assimilée souvent – dans les représentations des informateurs d'enquêtes – à une langue sacrée puisque celle du Coran, la situation devient carrément complexe. Et comme dans la pratique d'une langue et le choix d'une politique linguistique, comme le souligne Louis-Jean Calvet dans son ouvrage La Guerre des langues, il y a souvent une confrontation et forcément un rapport de domination, il devient très difficile d'envisager une langue qui n'est pas sa langue maternelle, dans la sérénité, et de la pratiquer sans qu'il y ait des interférences. Ce n'est donc pas pour rien que la langue est une composante essentielle de l'identité – aussi plurielle soit-elle.
Et quand cette dernière est flottante, l'espace entre les deux langues est vite franchi, voire pulvérisé. Dans le recueil de témoignages agencé en forme d'entretiens, La Langue française vue de la Méditerranée, de Patrice Martin et Christophe Drevet, paru aux éditions Média Plus, les journalistes interrogent sept auteurs algériens (Malika Mokeddem, Leïla Sebbar, Boualem Sansal, Malek Chebel, Assia Djebar, Rachid Boudjedra, Salim Bachi), et 32 autres du pourtour de la Méditerranée qui ont fait le choix d'écrire dans la langue de l'Autre, la langue française. Les questions, dans cet ouvrage préfacé par Maïssa Bey et élaboré à partir d'entretiens radiophoniques réalisés par les journalistes sur Médi 1, portent sur les représentations que se font les écrivains méditerranéens du français, de leurs langues maternelles et de leur manière de se projeter dans l'écriture, en faisant le choix d'une langue. Dans ce corpus, nous avons autant de représentations qui nous renseignent, de manière édifiante, sur le rapport des écrivains à la langue française et qui nous permettent de mieux cerner leurs écritures, tout en nous confirmant certains hypothèses.
D'abord, dès lors qu'un auteur choisi de s'exprimer dans une langue, la cohabitation devient difficile entre les deux moyens de communication, puisque le choix de l'un annule forcément l'autre. Si certains (comme Vassilis Alexakis, Tahar Bekri, Salim Bachi) entretiennent un rapport plutôt serein avec le français, préférant se concentrer sur la manière de faire vivre les deux langues (maternelle et français) à l'intérieur de leurs textes et à l'intérieur d'eux-mêmes, d'autres, comme Mohed Altrad (Syrie), concèdent qu'il y aurait “une forme de déracinement très fort”. La situation est encore plus dramatique pour les auteurs, principalement algériens, qui ont vécu la colonisation, comme c'est le cas avec Rachid Boudjedra, qui a dit subir cette langue et la vivant comme une fatalité.
Mythes et représentations
Le choix de la pratique d'une langue étrangère coupe le cordon avec sa première langue, ainsi le rapport avec celle-ci s'écarte de la réalité et devient à la fois fantasmée et chimérique. D'ailleurs, nombreux ont été les auteurs qui ont estimé que le recours à la langue maternelle se faisait par le biais de métaphores, ou se décelait dans le rythme des phrases et la construction globale d'un texte. La langue arabe (ou plus généralement maternelle) devient un autre territoire de l'imaginaire où l'auteur puise dans le grenier de ses souvenirs épars, des expressions, des métaphores, des anecdotes ou des situations qui transformeraient l'absence ou plutôt le silence d'une langue pour le rayonnement d'une autre. Le français est également, pour beaucoup d'écrivains, “la langue du rêve”, de “l'intimité” (pour Assia Djebar), un moyen d'émancipation (pour Malika Mokeddem), “une langue inventée” (pour Driss Chraïbi), “un refuge” (pour Michel del Castillo). Ils s'accordent également tous à dire que le français est rationnel et permet d'aller dans la précision.
Ce qui dénote que le lien qu'on entretiendrait avec sa langue maternelle est plutôt sentimental et irrationnel. Cette irrationalité, on la retrouve notamment chez Malek Chebel, qui a certes un rapport plutôt technique au français (puisque c'est son objet de travail), mais qui estime que l'arabe “c'est une langue littéraire, philosophique, religieuse, mais qui n'est pas du tout adaptée aux disciplines fines comme les sciences humaines”. Malek Chebel s'enferme donc dans une représentation figée de l'arabe, considérant qu'elle lui offre moins de libertés que le français.
On pourrait expliquer cette conception par le fait que l'auteur travaille sur la langue arabe sacrée, notamment celle du Coran. Le niveau de la langue utilisée peut expliquer la représentation qu'on se fait de celle-ci. Dans son témoignage, Boualem Sansal a plaidé pour “la francophonie” avec ses tenants “politiques et culturels”, tout en refusant qu'un “français spécifique” puisse se répandre. Il appelle, en quelque sorte, à une standardisation de la langue, donc de l'écriture. Heureusement que la littérature ne se limite pas à la langue ! Et c'est peut-être en cela que réside la faiblesse de cet ouvrage, dans sa manière donc de réduire le fait littéraire et romanesque ainsi que l'imaginaire à la représentation d'une langue utilisée. La langue est importante, mais elle n'est après tout qu'une des composantes de l'écriture. Si on sort de la littérature pour se placer dans un contexte socioculturel, alors la langue est avant tout un instrument de domination, et comme l'a souligné Abdelkébir Khatibi dans cet ouvrage, “il y a une lutte inconsciente à l'intérieur des langues”. Car elles sont assurément véhiculaires d'une culture, même s'il y a une intercommunicabilité entre les langues. Amin Maalouf nous éclaire sur ce point, en considérant que l'identité ne peut être que plurielle, qu'il faudrait au moins maîtriser trois langues, mais il ne faudrait pas se méprendre, parce que pour lui, les mouvements identitaires qui s'exacerbent ne sont en réalité qu'une réaction à l'uniformisation dans un contexte mondialisé.
S K
La langue française vue de la Méditerranée, de Patrice Martin et Christophe Drevet. Recueil d'entretiens, 190 pages, éditions Média Plus. 750 DA.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.