L'ex-Premier ministre tunisien par intérim Béji Caïd Essebsi a appelé à des élections dans un délai de neuf mois maximum pour “rectifier le tir” et mettre fin à une “crise grandissante” en Tunisie, dans une déclaration publiée jeudi. Dénonçant “la confusion qui caractérise les travaux de l'Assemblée nationale constituante” issue de l'élection du 23 octobre 2011, il a mis en garde contre “une crise de confiance politique”. Il a mis en demeure l'ANC et le gouvernement dirigé par l'islamiste Hamadi Jebali de se prononcer “clairement et formellement sur la durée” de leurs mandats pour “faire en sorte que les prochaines élections se tiennent au plus tard le 23 octobre prochain”. L'ancien Premier ministre, qui a dirigé durant dix mois le deuxième gouvernement intérimaire après la chute de Ben Ali en janvier 2011, a appelé à l'adoption d'“une feuille de route claire” sur l'avenir du pays. Béji Caïd Essebsi, 84 ans, avait envisagé de continuer d'assumer des fonctions politiques après les élections du 23 octobre. Récemment, il a fait une réapparition remarquée, revêtant symboliquement sa robe d'avocat pour soutenir la chaîne Nessma, poursuivie en justice pour la diffusion d'un film jugé blasphématoire. M. Essebsi a évoqué une “régression” et pointé “l'apparition des formes d'extrémisme violent menaçant les libertés publiques et privées”. Il a adressé un appel solennel à “l'ensemble des forces rejetant l'extrémisme et la violence (...) à se rassembler autour d'une alternative”. Il a déploré que l'Assemblée constituante n'ait pas accepté formellement de fixer la durée de sa mission à une année maximum, malgré un engagement pris en ce sens par les principaux partis avant les élections. Disciple de l'ancien président Habib Bourguiba - “le Père de l'Indépendance” - M. Essebsi a occupé plusieurs postes ministériels, notamment celui des Affaires étrangères sous le régime Ben Ali. Il a été ensuite député et président du parlement sous Ben Ali de 1990 à 1994. Par ailleurs, plusieurs partis de gauche tunisiens et des associations ont appelé à une “marche pour la défense des libertés” hier à Tunis, pour dénoncer “la multiplication des agressions”, “le discours fondamentaliste extrémiste” et “la passivité des autorités”. Cet appel, relayé sur les réseaux sociaux, est signé par six partis de l'opposition de gauche affirmant vouloir “défendre la démocratie et les libertés en Tunisie”. Il dénonce “la multiplication des agressions physiques et verbales” contre les citoyens, les militants ou les journalistes, et “le discours fondamentaliste extrémiste appelant à la haine et à la violence entre Tunisiens”. “Le gouvernement traîne à prendre les mesures nécessaires pour arrêter cette tendance”, s'inquiètent les signataires de l'appel. Les incidents impliquant des radicaux de la mouvance salafiste se sont multipliés ces derniers mois, particulièrement dans des universités où les partisans du niqab, le voile intégral, accroissent leurs pressions. Par ailleurs, des déclarations en début de semaine d'un député d'Ennahda, le parti islamiste qui domine le gouvernement, ont soulevé un tollé en Tunisie. évoquant les manifestants qui bloquent des routes ou des usines à travers le pays, le député Sadok Chourou a cité un verset du Coran évoquant l'“exécution”, la “crucifixion” ou encore le démembrement.