Le Premier ministre tunisien Béji Caïd Essebsi a décrété, hier, l'interdiction de toute activité syndicale au sein des forces de sécurité, et annoncé “une stricte application de l'état d'urgence” en vigueur dans le pays depuis la chute du régime de Ben Ali. “J'ai décidé à partir d'aujourd'hui d'interdire toute activité syndicale des forces de sécurité, au vu des dangers que cela représente pour la sécurité du pays”, a déclaré M. Caïd Essebsi au cours d'une allocution prononcée au palais gouvernemental. Il a également annoncé une “application stricte de l'état d'urgence”, décrété après la chute du président déchu Ben Ali le 14 janvier, et prolongé depuis par décrets successifs, jusqu'au 31 novembre. Les Tunisiens sont appelés à voter le 23 octobre pour élire une Assemblée constituante, qui constituera le premier scrutin depuis la chute de Ben Ali. “Nous sommes en état d'urgence et le gouvernement va faire appliquer la loi”, a martelé le Premier ministre, rappelant que celle-ci interdisait “toutes les manifestations, toutes les grèves et toutes les réunions qui peuvent toucher à la sécurité du pays”. “Le ministère de l'Intérieur a le droit d'assigner à résidence toute personne connue pour des activités touchant à la sécurité intérieure”, a-t-il ajouté. “Il s'est passé beaucoup de choses dangereuses dans le pays, et ça concerne tous les citoyens”, a-t-il dit, indiquant que le gouvernement s'était réuni lundi pour discuter des mesures à prendre en matière de sécurité. Des violences ont secoué ces derniers jours les régions du centre et du sud-ouest de la Tunisie, faisant au moins deux morts et des dizaines de blessés, et trois villes ont été placées sous couvre-feu nocturne. M. Caïd Essebsi a accusé “des parties” d'être “derrière ce qui se passe dans les régions de Tunisie”. “Il est étonnant qu'à chaque fois que les échéances électorales se rapprochent, des campagnes de dénigrement et des troubles éclatent”, a-t-il déclaré. “Les élections se tiendront le 23 octobre, notre objectif est de réaliser un scrutin transparent et libre pour la première fois dans le pays”, a-t-il souligné. L'interdiction de l'activité syndicale au sein des forces de sécurité a été annoncée alors que des centaines de policiers ont manifesté, hier, devant la Kasbah, à l'appel de l'Union des syndicats des forces sécuritaires de l'Intérieur, fédérant des organisations de policiers et de gendarmes. Les manifestants ont réclamé les démissions du ministre de l'Intérieur Habib Essid et du chef d'état-major de l'armée tunisienne, le général Rachid Ammar. Ils ont accusé le premier d'“ignorer leurs revendications” et le second “d'être derrière les troubles actuels en Tunisie dans le but de prendre le pouvoir”. M. Caïd Essebsi a qualifié cette manifestation d'“incitation à l'insurrection”.