Si on prend avec sérieux les comptes rendus rapportés par nos confrères marocains suite à la rencontre qu'ils ont eue avec leur ministre des Affaires étrangères qui les a briefés sur sa visite en Algérie, la profession est encore une fois visée. Elle est accusée de semer le trouble entre les deux pays, de faire dans la désinformation, d'être à l'origine du blocage des négociations et de saborder les passerelles mises en place. Rien que cela. Aussi, les deux ministres ont appelé à “l'arrêt des hostilités médiatiques”. La presse, du moins algérienne, et dans sa majorité, ne fait que rapporter des faits comme c'est sa mission, et les quelques articles sévères publiés n'ont fait que répondre à des campagnes de désinformation touchant le pays et les citoyens par certains titres proches du palais et de certains cercles. Il ne faudrait pas que l'incapacité du politique soit mise sur le dos du journaliste. Cet ordre intimé à la profession des deux pays, qui peine à avoir un statut et des textes pour la protéger, sera-t-il le prélude à un serrement de vis ? Chez nous, même critiqué, un alinéa de l'article 3 de la nouvelle loi sur l'information est passé et qui stipule : l'information est une activité qui doit s'exercer dans le respect, entre autres, “des impératifs de la politique extérieure du pays”. En clair, ne pas porter des critiques sous forme d'analyse ou de commentaires sur un secteur régalien qui engage toute la nation. Faudrait-il puiser ailleurs l'information des médias étrangers ? Enfin, la leçon que vient de donner le ministre des Affaires étrangères à ses hôtes d'Alger, c'est sa rencontre avec des directeurs de journaux qu'il a mis dans la confidence avec certainement des clés de lecture livrées en off record. Ce qui n'est malheureusement pas le cas chez nous où c'est le black-out total, où une bribe d'information devient un parcours du combattant pour le journaliste. Depuis 1999, ni le Président, pourtant volubile, ni les Premiers ministres, ni les détenteurs de ministères sensibles n'ont, un jour, appelé les directeurs de journaux pour des éclairages importants en cette phase cruciale pour ne pas tomber, justement, dans des analyses approximatives. O. A. [email protected]