La Chine et la Russie ont opposé leur veto, samedi, à un projet de résolution du Conseil de sécurité de l'ONU condamnant la répression en Syrie pour éviter de “nouveaux troubles et victimes”, a affirmé l'agence officielle chinoise Chine nouvelle, expliquant que le veto est destiné à permettre “la poursuite de la recherche d'un règlement pacifique de la crise syrienne chronique” ! “En opposant leur veto, la Russie et la Chine affirment que plus de temps et de patience devraient être consacrés à dégager une solution politique à la crise syrienne, épargnant ainsi au peuple syrien de nouveaux troubles et victimes”, ont ajouté de leur côté les autorités russes ! Pourtant, jusqu'au dernier moment, des tractations s'étaient poursuivies pour tenter de convaincre la Russie particulièrement de ne pas bloquer l'adoption d'un texte édulcoré qui mettait seulement en garde la boucherie de Damas. Après des échanges qualifiés de vifs entre Mme Clinton et Lavrov, chefs respectifs de la diplomatie américaine et russe, Moscou a annoncé que son ministre des AE et son chef du renseignement extérieur allaient se rendre à Damas pour rencontrer Al-Assad, mardi. Le but de la visite n'a pas été précisé, certainement pour l'inviter à plus de retenue dans son massacre. C'est la deuxième fois que Moscou et Pékin volent au secours de Bachar Al-Assad en empêchant le Conseil de sécurité de sortir de onze mois de silence sur la Syrie, pendant lesquels la répression a fait au moins 6000 morts selon l'opposition regroupée derrière le CNS (conseil national syrien). Un scénario identique des deux pays avait bloqué une précédente résolution en octobre 2011. Moscou et Pékin se retrouvent ainsi au ban de la communauté internationale. Dans les capitales occidentales, l'emploi excessif du droit de veto par le couple russo-chinois a été dénoncé. Washington, Paris, Londres, Berlin et d'autres capitales parlent de “crimes de guerre”. Sur la scène arabe, le CNS, qui considère la décision russo-chinoise d'irresponsable et comme un permis donné au régime syrien de tuer dans l'impunité, a souhaité la rupture avec le régime syrien. Hamadi Jebali, le Premier ministre tunisien, appelle les pays arabes à expulser les ambassadeurs syriens. “Le peuple syrien attend des actes (...) La moindre des choses est de couper l'ensemble des relations avec le régime syrien (...) Nous devons expulser les ambassadeurs syriens des pays arabes et de tous les autres”, a-t-il déclaré à la Conférence sur la sécurité de Munich, à laquelle ont pris part la secrétaire d'état américaine et son homologue russe, au lendemain de l'annonce par Tunis de l'expulsion du représentant syrien en Tunisie. Les Frères musulmans de Jordanie ont appelé à boycotter les produits russes et chinois. Les ambassades syriennes au Caire et au Koweït ont été saccagées. Les populations arabes se demandent aujourd'hui pourquoi Russes et Chinois n'ont pas déployé autant d'énergie pour contraindre Israël à accepter l'instauration de l'état de la Palestine, venir au secours de Palestiniens, victimes eux aussi d'exactions et déni à une vie humaine ? Et c'est vrai, la Russie, qui fait partie du Quartet pour la résolution de la question palestinienne, n'a jamais, évoqué la moindre allusion quant à taper sur la table comme elle le fait volontiers pour le régime syrien. Les peuples arabes qui ont commencé à s'émanciper de leurs états en intégrant progressivement dans leur conscience et pratique la notion d'opinion libre par rapport aux pouvoirs, fussent-ils islamiques, savent aujourd'hui à quoi s'en tenir avec la propagande russo-chinoise sur leurs amitiés et fraternités. D. B