À moins d'une semaine du premier tour de la présidentielle au Sénégal, la mobilisation d'une partie de la rue contre la candidature du président Wade ne faiblit pas. Des manifestants ont de nouveau dressé à Dakar des barricades, brûlé pneus et poubelles, et affronté la police anti-émeute. Et pas que dans la capitale interdite de manifestations. Les affrontements qui se poursuivaient dimanche après-midi, ont fait des centaines de blessés. Quant aux morts, il n'a été enregistré que celle d'un jeune qui a succombé à ses blessures à Kaolack, au Centre-Ouest, lors de la manifestation pour protester contre la profanation d'une mosquée de Dakar par la police qui pourchassait des manifestants réfugiés dans ce lieu de culte. Le climat est très tendu et l'opposition, partisane et de la société civile regroupée derrière le Mouvement du 23 Juin (M23), continue d'appeler à manifester contre la candidature de Wade. Le M23, plus actif, a franchi un pas dans ses actions, en déplaçant le théâtre de ses rassemblements au Plateau, au centre-ville de la capitale, où le ministère de l'Intérieur a interdit toute manifestation, en y installant un impressionnant dispositif de sécurité. Le ton est monté d'un cran vendredi, lorsque des agents de forces de l'ordre ont lancé une bombe lacrymogène dans une mosquée de la grande confrérie Tidiane, provoquant la colère des habitants de Tivaouane, ainsi que plusieurs soulèvements spontanés à Kaolack, où un manifestant a succombé à ses blessures. Samedi, le ministre de l'Intérieur en personne s'est rendu dans le quartier de la mosquée pour essayer de calmer les esprits, il a rencontré le khalife général de la confrérie, qui a appelé au calme et à la sérénité. Wade compte sur l'électorat des confréries traditionnellement proches du pouvoir. Mais, la sociologie politique du Sénégal a changé, comme dans la plupart des pays musulmans. Le Printemps arabe a fait des émules un peu partout en Afrique. La jeunesse sénégalaise rêve aussi de sa place Tahrir, elle s'est constituée ses propres canaux de mobilisation. Au M23, s'est additionné le mouvement “Y en a marre”, plus large et plus actif. Le premier tour met en compétition une douzaine de candidats dont bien sûr le sortant Wade qui s'était bricolé –comme la quasi-majorité de ses pairs africains – une nouvelle Constitution à la mesure de ses nouvelles ambitions. D. B.