Ce “trou d'air” est révélateur des profondes divergences qui minent la mouvance islamiste, en dépit de leur discours fédérateur de circonstance. En annonçant vendredi la formation d'une alliance de trois partis islamistes, le MSP, Ennahda et El-Islah dont il préside le mouvement en perspective des prochaines élections, Hamlaoui Akouchi a-t-il parlé trop tôt ou trop dit ? Au lendemain de cette sortie, visiblement impromptue, ses prétendus partenaires ont convoqué leurs madjliss echoura respectifs pour se pencher, entre autres, sur la perspective d'alliance des partis islamistes dont l'ambition de rafler la mise lors du prochain scrutin, encouragé par la poussée islamiste en Tunisie, au Maroc et en Egypte, n'est pas dissimulée. Au sein du MSP, même si le chef du parti, Abou Djerra Soltani, semble favorable sur le plan du principe, une frange de la base est, quant à elle, réfractaire à ce “concubinage”. Dans des déclarations au journal online TSA (tout-sur-lalgerie), le président du madjliss echoura du MSP, Abderahmane Saïdi, a contenu difficilement son agacement. Selon lui, il est très “difficile et parfois même impossible” d'entrer dans la bataille des prochaines élections avec des listes communes. “Je suppose que chaque parti souhaite être en tête de liste dans sa wilaya favorite, encore faut-il convaincre la base”, estime-t-il. Mais le souci du MSP, connaisseur des mécanismes de fonctionnement du sérail, parti dont la stratégie politique repose sur l'entrisme, et qui ne souhaite pas détacher les amarres de la périphérie du pouvoir, est de s'associer à des partis dont l'ancrage reste à démontrer. “El-Islah est libre de faire des déclarations sur le projet de l'alliance. Mais, au final, chaque partie prendra en considération les intérêts de son parti, avant toute autre considération”, a affirmé Saïdi. “On ne peut pas parler de listes communes, alors que le conseil national n'a pas encore tranché l'option de la participation aux élections législatives”, renchérit pour sa part, le secrétaire général d'Ennahda, Fateh Rebaï. Pourtant, vendredi, le président d'El-Islah a présenté cette alliance comme un couronnement d'un travail de longue haleine. “Cette alliance est intervenue après une longue réflexion et fait suite à l'appel du membre du conseil consultatif du mouvement Ennahda, Azzedine Djerafa”, a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse. Selon lui, cette alliance entre les trois partis pour entrer avec des listes communes aux prochaines élections, “tant attendues” par le peuple algérien, est encore “ouverte à tous ceux qui veulent intégrer l'alliance”. Dès lors, il s'agit de savoir si le président d'Ennahda a tôt vite fait de parler, histoire de tirer la couverture à lui, ou pour mettre les autres partis devant le fait accompli et influer sur leurs bases respectives. Ce “trou d'air” est révélateur des profondes divergences qui minent la mouvance islamiste, en dépit de son discours fédérateur de circonstance. Au-delà des divergences liées à l'ambition des uns et des autres, à leurs parcours, à leurs approches de la crise nationale, c'est essentiellement la nature des rapports qu'entretiennent certains avec les cercles décideurs qui font désordre au sein de la mouvance. Abdallah Djaballah, présenté parmi les durs, a déjà exclu toute idée d'alliance avec ses “frères ennemis”. K. K