Les nouvelles technologies de la communication ont beaucoup aidé les femmes mariées qui ont dû laisser tomber leur carrière professionnelle après le mariage à continuer à exercer un métier tout en restant à la maison. Nassima était une prof de couture et de décoration florale très sollicitée par les filles de son quartier. Installée dans un local à Baba-Hassen, les filles, surtout celles en voie de se marier, se bousculaient pour s'inscrire à ses cours. Elle avait, en effet, réservé le lundi pour la couture et le jeudi pour la décoration florale et les articles de mariée. Passionnée par son métier, Nassima était une prof très rigoureuse qui se donnait beaucoup de mal pour transmettre la formation aux jeunes filles en âge de se marier. Mais depuis son mariage avec un voisin, elle ne sort plus. Elle est devenue femme au foyer s'occupant seulement de sa maison. Cette situation, qui l'indispose au plus haut point, car habituée à dispenser le savoir, a également déplu à ses élèves qui n'ont pas accepté d'arrêter leur formation chez elle. Et pour cause elles ont appris des merveilles chez Nassima et préparé l'essentiel de leurs trousseaux de mariée grâce à ses cours (confection de couvre-lits, de draps décorés de rubans et de fleurs, de nappes, napperons, coussins, de caftans, de robes de soirée…). Ses élèves qui lui sont très reconnaissantes ne l'ont pas oubliée. Elles l'appellent souvent et lui reconnaissent une compétence et une assiduité qu'elles n'ont pas trouvé ailleurs. Mais pas seulement ! Ses anciennes élèves et d'autres filles qui la connaissent de réputation la sollicitent en permanence pour reprendre les cours. C'est, cependant, cause perdue compte tenu de la sévérité de son mari qui a exigé au début de leur rencontre qu'elle devienne femme au foyer après le mariage. C'était une condition pour le mariage. Karima, Kenza, Lynda ses voisines avec lesquelles elle entretenait des relations amicales lui ont demandé de donner des cours de couture à domicile. Cette suggestion n'a pas été du goût du mari qui l'a rejetée. Ce rejet a poussé ses trois amies à réfléchir à deux fois pour trouver une solution à cette situation. Et c'est Lynda qui a eu une idée salvatrice pour sa prof Nassima. Elle lui a, en effet, suggéré de placer une webcam à la maison et de dispenser ses cours grâce à ce dispositif. “Quand Lynda m'a demandé de placer une webcam, j'ai tout de suite dit non car je ne comprends rien à la technologie. Je suis une fille qui est loin d'être une intellectuelle. Ma seule formation porte sur la couture et la décoration florale que j'ai suivies dans un centre de formation professionnelle il y a huit ans, donc je suis limitée au point de vue connaissances et me sens inapte à comprendre la technologie et encore moins un dispositif comme la webcam”, explique Nassima à ce propos. “Et de me suggérer de dispenser des cours à travers une webcam, était pour moi au début une idée saugrenue et impossible à mettre en application”, précise-t-elle encore à ce sujet. Un dispositif technologique qui rend la vie facile Mais Lynda ne tardera pas à lui faire changer d'avis. “J'ai dit à ma prof que la webcam est d'une utilité étonnante, elle m'a permis de garder un contact continuel avec ma sœur qui s'est mariée au sud du pays et qui m'a aidée à préparer mon bac. J'ai réussi grâce à son concours”. “En 2007, ma sœur, une prof de maths au lycée, s'est mariée à Hassi-R'mel, à une année charnière pour moi puisque je préparais mon bac”, raconte Lynda, qui fera observer que “j'étais entrée dans une colère noire car ma sœur, la prof de maths qui maîtrisait également la physique et les sciences, se trouvait à mille lieues de moi au moment où j'avais le plus besoin d'elle”. “Et c'était ce besoin intense de la voir m'assister l'année où je devais coûte que coûte avoir les meilleurs résultats qui a fait naître en moi l'idée de placer une webcam chez moi et chez elle pour recevoir son aide”, argue-t-elle. “On utilise bien la webcam pour discuter et voir des personnes, pourquoi nous ne l'utiliserions pas pour des choses autrement plus utiles comme une formation ?” s'interroge-t-elle. Lynda a aussi expliqué comment sa mère garde le contact avec son frère qui a émigré en Angleterre il y a cinq ans. “Lors des fêtes de l'Aïd, à l'occasion des anniversaires ou de tout autre évènement, on place la webcam et maman communique avec mon frère pour lui permettre de vivre l'évènement en même temps que nous et le ramener en quelque sorte en Algérie”, explique Lynda. “Ma mère est une illettrée mais compte tenu de sa volonté à maintenir le contact avec mon frère en Angleterre, elle, une vieille de 67 ans, sait maintenant manier une webcam”, relève-t-elle avec une grande fierté. “Ce n'est pas sorcier d'utiliser une webcam”, estime-t-elle, tout en indiquant que “les gens ont tendance à compliquer les choses qu'ils ne connaissent pas”. Et à Lynda d'interroger sa prof Nassima “puisqu'une femme de 67 ans, qui n'a jamais été à l'école, peut manipuler une webcam, pourquoi pas toi Nassima, tu n'as que 38 ans ?” Une communication facile et moins de contraintes et de dépenses Lynda n'a pas manqué d'expliquer en détail à sa prof les avantages de la webcam : un ordinateur ne rend pas seulement les tâches plus faciles, il permet également une communication plus rapide et plus efficace. La communication par webcam réduit la nécessité de dépenser autant pour les appels de longue distance. Lynda précisera à ce propos que “la webcam est maintenant l'une des méthodes de communication les plus efficaces sur Internet. En utilisant ce dispositif, on peut se parler et voir le visage de l'autre personne sur son écran. Parce qu'on entend la voix de l'autre personne et on voit également son expression faciale, ce dispositif permet plus facilement de communiquer et de comprendre”. “Je lui ai dit que je connaissais beaucoup de gens qui ont investi dans leur propre webcam et microphone. Au lieu de voyager pour rencontrer des gens, beaucoup de personnes utilisent une webcam et des appareils audio pour communiquer. C'est moins coûteux, cela évite la paperasse et c'est rapide et facile”. Il faut dire, à ce propos, que certains patrons d'entreprise organisent des réunions avec leur personnel même quand ils sont absents du bureau. Cette argumentation a eu de l'effet sur Nassima, qui a voulu essayer la webcam pour reprendre son statut d'enseignante. “Le vendeur de matériel informatique m'a expliqué que si je voulais acheter une webcam avec son propre micro, je n'aurais pas besoin de passer par un microphone séparé. Cela rend également mon espace plus organisé car il y a moins d'accessoires à être mis en place avec l'ordinateur”, dit-elle. “J'ai accepté sa proposition et me voilà dotée d'une webcam à la maison grâce à laquelle je donne mes cours de couture et de décoration florale comme au bon vieux temps”, insiste-t-elle. Selon elle, ce procédé “est miraculeux, génial, salvateur, facile, très utile et a surtout transformé ma vie du tout au tout”. “Je ne suis plus une simple femme au foyer, j'ai acquis, grâce à ce petit dispositif peu coûteux, le statut de professeur”, lance-t-elle avec un large sourire. Qui a dit que les femmes au foyer ne savaient pas manier les nouvelles technologies de la communication ? N. M.