Les partis engagés dans la course aux législatives avaient jusqu'à minuit hier pour déposer leurs listes de candidatures. Une opération qui s'est apparentée à une véritable césarienne pour bon nombre d'entre eux. Sur fond de contestations tous azimuts, la confection des listes aura démontré que les bases partisanes n'étaient plus disposées à cautionner tout ce que décident leurs directions respectives. Le parti de Belkhadem, empêtré dans une crise interne sans précédent, a eu tout le mal du monde à confectionner ses listes. Ne pouvant pas contenter à la fois les dinosaures, les redresseurs et les jeunes loups, le parti s'est livré à un exercice fort périlleux aux résultats incertains. D'habitude, le parti se cachait derrière le parapluie présidentiel pour justifier ses décisions et faire taire les avis divergents en son sein. Mais cette fois-ci, le parti avait pris sur lui de s'opposer à la volonté du Président de procéder à des réformes politiques profondes. Le FLN a dû reconduire la majorité de ses ministres sur ses listes de candidatures, au grand dam des militants de la base, mais aussi des redresseurs qui ont fini par comprendre, à la dernière minute, qu'il fallait présenter des listes indépendantes et ne pas compter sur Belkhadem, soumis à de fortes pressions. La grande “victime” de cette pression a été le président sortant de l'APN. Abdelaziz Ziari a été sacrifié sur l'autel des calculs et des pressions. Il aura attendu l'ultime journée, pour publier, hier, un communiqué où il annonce avoir renoncé à se porter candidat, non sans lancer une pique contre Belkhadem en indiquant que sa décision s'inscrit “en droite ligne des réformes votées par l'APN, et des engagements pris par le président de la République de donner toute leur chance aux nouvelles générations”. Le RND connaît aussi une levée de boucliers de sa base. De Batna et de Biskra, de Constantine et d'Oran, ou encore de Tiaret, des voix s'élèvent pour contester les choix d'Ouyahia. Mais c'est dans le grand-Sud que la situation risque de dégénérer. En écartant les chefs tribaux, Ouyahia prend le risque de compromettre les chances de son parti. À Tamanrasset, les anciens responsables du parti ont décidé de se venger contre la décision de leur patron en optant pour le boycott du scrutin. Une décision qui risque de faire tache d'huile. Le MSP n'a pas eu trop de mal à imposer ses noms dans la “coalition verte”. Abou Djerra Soltani a réussi à entraîner les deux formations nées des scissions avec Abdallah Djaballah, dans son sillage, en offrant à leurs chefs la chance d'être têtes de liste dans leurs wilayas respectives. Mais, en gros, ce sont les députés et ministres MSP qui mènent la majorité des listes, sous le couvert d'une coalition qui surfe sur la vague du Printemps arabe. Mais le MSP et ses deux alliés seront concurrencés par Abdallah Djaballah qui, lui aussi, se projette en tant que futur Premier ministre ! Il y a aussi l'ambitieux Abdelmadjid Menasra, qui mise sur les salafistes et certaines figures de l'ex-FIS. D'ailleurs, l'imam de Chevalley, El- Hachemi Sahnouni, a prédit une victoire du duo Djabballah-Menasra, une sorte d'instruction donnée à ses fidèles. En fait, les choses ne sont pas aussi limpides que l'on croit au sein de la mouvance islamiste. D'une part, les deux leaders de l'ex-FIS, Abassi Madani et Ali Belhadj, appellent au boycott du scrutin, et d'autre part, l'ancien “émir” du bras armé du FIS, Madani Mezrag, veut une place dans le nouvel échiquier politique. Ali Belhadj enfonce “l'alliance verte” et le duo Menasra-Djaballah en leur ôtant la casquette islamiste. “Ils sont comme les autres partis, ils n'osent même pas assumer leurs références islamistes”, accuse-t-il. Du côté de l'opposition traditionnelle, le FFS connaît des contestations émanant de plusieurs régions. Ses listes ne parviennent pas à convaincre sa base, déjà divisée sur la participation à ce scrutin. Quant au PT, sa patronne a puisé dans les rangs de l'UGTA une bonne dizaine de secrétaires nationaux, dont le plus controversé reste celui qui est à la tête de la Fédération de l'électricité et du gaz et qui est toujours poursuivi en justice pour une affaire de dilapidation de biens publics. À noter que le phénomène qui a aussi marqué cette fastidieuse confection des listes a été celui de la corruption. Des places de candidats se sont “vendues” à des centaines de millions, au vu et au su de tout le monde, ce qui risque de jeter un sérieux discrédit sur l'élection et la future assemblée. A B