La Guinée-Bissau a été suspendue mardi de l'Union africaine (UA) à la suite du coup d'Etat du 12 avril, et les putschistes sont menacés de sanctions par l'Organisation panafricaine, qui dénonce la multiplication des coups de force dans ce pays miné par l'instabilité et le trafic de drogue. Le Conseil de paix et de sécurité de l'UA “décide de suspendre, avec effet immédiat, la Guinée-Bissau de toutes ses activités de l'Union africaine, tant que l'ordre constitutionnel ne sera pas rétabli”, a annoncé Ramdane Lamamra, commissaire africain, à l'issue d'une réunion à Addis-Abeba. “Etant donné la fréquence des coups d'Etat en Guinée-Bissau”, l'UA a demandé à l'Afrique de l'Ouest de lui “soumettre, dans les deux semaines, une décision ou une proposition de sanctions” contre les putschistes et leurs soutiens civils et militaires, a-t-il dit. Juste auparavant, une délégation ouest-africaine, composée de hauts responsables politiques et militaires, avait affiché une grande fermeté face aux putschistes avec lesquels elle s'était entretenue plusieurs heures pour essayer de les rendre à la raison. La Cédéao (Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest) a pour principe d'avoir une tolérance zéro pour tout exercice du pouvoir par des voies non conventionnelles, a rappelé aux putschistes le président de la délégation, soulignant l'exemple encore chaud du Mali où la junte militaire a jeté le gant face à la pression de l'organisation sous-régionale. Mais Bissau n'est pas le Mali et la situation dans ce dernier pays a été aggravée par la proclamation d'indépendance de son Nord par les rebelles touaregs infiltrés par des groupes islamistes dont l'Aqmi. Selon les représentants de la Cédéao, les mutins de Bissau ont réaffirmé leur engagement, déjà proclamé à plusieurs reprises, de rétablir l'ordre constitutionnel mais le processus serait bloqué par leur refus de libérer les prisonniers. Arrêtés le jour du coup d'Etat, l'ancien Premier ministre Carlos Gomes Junior, le président intérimaire Raimundo Pereira et plusieurs ministres du gouvernement déchu sont toujours détenus par les putschistes. Selon des voix proches des putschistes, la junte pourrait accepter de rendre le pouvoir aux civils à la condition que l'ex-Premier ministre en soit exclu. Les militaires, qui ont fermé les frontières du pays, ont interdit les marches et manifestations, menaçant les contrevenants d'une répression sévère, selon un communiqué de leur état-major, qu'elles soient pour ou contre le renversement de Carlos Gomes Junior. Le coup d'Etat est intervenu à un peu plus de deux semaines du second tour de la présidentielle qui devait opposer le 29 avril Carlos Gomes Junior, donné favori, à son principal opposant Kumba Yala. Ce dernier avait annoncé qu'il refusait d'y participer, invoquant des fraudes massives au premier tour. Son boycott avait été suivi par quatre autres candidats éliminés, faisant craindre de nouveaux troubles dans ce petit pays au passé tumultueux, considéré comme la plaque tournante du trafic de cocaïne entre l'Amérique du Sud et l'Europe. En début de semaine, 17 partis d'opposition, au premier rang desquels le Parti de la Rénovation sociale (PRS) de Kumba Yalla, avaient accepté de passer un accord avec la junte sur la dissolution des institutions du pays et la création d'un Conseil national de transition (CNT) chargé de redessiner les nouvelles institutions et de former un gouvernement national de transition. D. B