N'ayant pas accepté l'accord sur la transition au Mali, les partisans des putschistes, qui ont renversé Amadou Toumani Touré le 22 mars dernier, ont agressé lundi le président par intérim, Dioncounda Traoré. Ce dernier, âgé de 70 ans, a été blessé dans son bureau à Koulouba, près de Bamako, par des manifestants répondant à l'appel de plusieurs organisations et associations favorables au coup d'Etat. Certains manifestants ont pu, en dépit de la présence de militaires, pénétrer dans le bureau de Dioncounda Traoré et l'ont frappé. Brièvement admis aux urgences, avec “une blessure au visage et une au dos”, le président intérimaire a quitté l'hôpital, après qu'un examen médical eut “révélé qu'il n'y avait pas de lésion grave”. Avant de se rendre à Koulouba, les manifestants opposés à cet accord sur la transition qu'ils qualifient de “trahison” avaient protesté dans le centre de Bamako. Condamnant cette agression, le chef des auteurs du putsch, le capitaine Amadou Haya Sanogo, a affirmé dans un communiqué que l'ex-junte a appris la nouvelle “avec consternation”, avant d'ajouter : “ces actes d'agression (...) ne peuvent justifier aucune expression d'opinion, ni une contestation populaire”, tout en exhortant au dialogue, à “plus de tolérance et de retenue”. Cette agression est la preuve que le calme est loin d'être revenu au Mali, dont le Nord est toujours occupé par les islamistes d'Ançar Eddine et les rebelles du MNLA. L'insécurité est toujours là, au point où le chef de l'Etat par intérim se fait agresser par des manifestants dans son propre bureau. C'est également un signe que les Maliens sont encore très divisés sur la manière avec laquelle la transition devra être gérée pour un retour à l'ordre constitutionnel. En effet, depuis la prise de fonction du président intérimaire et la nomination de son Premier ministre Cheick Modibo Diarra, le Mali est toujours en proie à la crise née du putsch. Bien qu'ayant accepté de rendre le pouvoir aux civils par un accord-cadre avec la Cédéao signé le 6 avril, l'ex-junte militaire ne s'était jamais véritablement retirée de la scène politique. Cette situation profite aux groupes armés qui contrôlent depuis près de deux mois les trois régions administratives du Nord, vaste et aride : Kidal, Gao et Tombouctou. Si, en dépit du traumatisme qu'il vient de subir, Dioncounda Traoré accepte de poursuivre sa mission, il devra organiser des élections d'ici à 12 mois et surtout tenter de résoudre la crise dans le Nord où, selon l'ONU, près de 350 000 personnes ont fui depuis la mi-janvier leur domicile pour se réfugier à l'intérieur du Mali ou dans des pays voisins.