Dans la première partie, l'économiste a expliqué les raisons pour lesquelles les entreprises publiques étaient sous-gérées dans les années 1960 et 70. Dans cette dernière partie, il expose l'évolution du management des entreprises des année 1980 à nos jours. Au début des années quatre-vingts, deux remises en cause essentielles caractérisaient la nouvelle ère. La première est d'ordre macroéconomique. Elle stipule que nous avons exagéré dans l'allocation des ressources aux industries lourdes. Il fallait développer également les industries de consommation et les équipements collectifs (barrages, routes, PME, etc.). En management, le diagnostic réalisé épinglait la période passée qui avait totalement occulté la dimension managériale. Le schéma thérapeutique managérial consistait alors à démembrer les grandes entreprises pour les rendre “humainement gérables". Nous avons inventé une doctrine managériale qui n'existait nulle part. Au moment où les entreprises mondiales commençaient à fusionner pour créer des ensembles plus grands, l'Algérie faisait tout à fait le contraire. à cette époque, le concept de courbe d'expérience influençait de nombreux dirigeants mondiaux qui visaient le regroupement d'entités pour constituer des groupes plus forts, plus compétitifs et dotés d'économies d'échelles. L'Algérie faisait tout à fait le contraire. Les résultats furent décevants. Les déficits s'étaient multiplié par 2,7 et les taux d'utilisation des capacités restaient les mêmes. Nous avons là un second échec managérial qui devenait plus flagrant après 1986, lorsque l'endettement international et la crise des prix de l'énergie infligèrent une sévère récession au pays. Au niveau managérial, le fameux SGT (statut général du travail) opérait une centralisation excessive du management des ressources humaines au détriment des décisions managériales. Les fiches de postes qui constituaient une pièce maîtresse du dispositif organisationnel de l'entreprise furent gérées centralement par des départements ministériels. Une partie importante du processus de management des ressources humaines fut confisqué au profit d'une bureaucratie centrale. De l'autonomie à nos jours Les réformes de libéralisation macroéconomique devaient impulser une modernisation managériale. Les réformes microéconomiques furent nombreuses : autonomie des entreprises, holding, restructuration par SGP, etc. Les revirements de politiques macroéconomiques étaient fréquents : PAS, relance, etc. Entre-temps, le secteur privé qui représentait 20% du PIB hors hydrocarbures est passé à plus de 75%. Quelques entreprises publiques mais surtout privées se sont distinguées par des avancées managériales considérables : comptabilité analytique, gestion participative par objectifs, organisation par centres de responsabilité, etc. Elles ont même instauré des systèmes de partage de la valeur ajoutée très intéressants et qui recevait l'approbation des personnes concernées. Mais la vaste majorité demeure sous-gérée. Ce qui a changé était uniquement une prise de conscience sérieuse que le management est la ressource des ressources, celle qui permet à toutes les autres d'enrichir au lieu d'appauvrir une nation. Une grande partie des entreprises privées s'est inspirée des modes de fonctionnement public. C'est pour cela qu'elles ont besoin de mise à niveau. Dans l'ensemble, les pratiques managériales demeurent très insuffisantes. Nous avons besoin de moderniser nos pratiques managériales comme élément essentiel de l'offre. Sans cela, toute politique économique serait inévitablement vouée à l'échec. Les politiques de demande échouent toujours dans les pays sous-développés, mais les politiques de l'offre réussissent partout où on a un management efficace. Le programme de mise à niveau demeure le seul espoir pour révolutionner les pratiques managériales. Il faut beaucoup de conditions pour le réussir. Nous n'avons pas droit à l'erreur, car ce serait l'anéantissement de tout espoir de développement. A. L. docteur en sciences de gestion des entreprises