La désignation du gouvernement version Sellal présage d'une nouvelle configuration du paysage politique national. Première victime de ce changement dans la continuité : l'alliance présidentielle, qui battait déjà de l'aile depuis la défection du MSP. Les élections législatives de mai dernier ont, certes, permis au FLN de dominer largement le nouveau Parlement, mais c'est tout. Aucune incidence sur la composition du gouvernement, encore moins sur les lois fondamentales qui devraient être adoptées par le Parlement. Les leaders de l'alliance présidentielle ne font plus partie de l'Exécutif. Abdelaziz Belkhadem, qui jouissait du statut de ministre d'Etat, représentant du président de la République, est débarqué au même titre qu'Ahmed Ouyahia et, avant eux, Abou Djerra Soltani. L'alliance présidentielle aura fait son temps et le président Bouteflika s'en débarrasse, sans ménagement. Il est vrai que le chef de l'Etat, après douze ans de règne, et un troisième mandat qui arrivera à échéance en 2014, n'est plus en situation de probable candidat à sa propre succession et, donc, n'a plus besoin de s'encombrer d'alliances inutiles. Toutefois, et même s'il se met hors course pour 2014, il n'est pas dit qu'il n'aura pas son mot à dire au sujet de son successeur. C'est dans cette perspective qu'il faudrait voir l'entrée au gouvernement des leaders de nouveaux partis politiques. On y voit la touche de Saïd Bouteflika, certes, mais ce qui importe le plus, c'est cette volonté de propulser de nouveaux partis politiques, en prévision de l'élection présidentielle de 2014. Les partis traditionnels se verraient sérieusement concurrencés, en tous cas, et commencent déjà à compter les défections, notamment le MSP, mais aussi le RND dont des cadres hésiteraient entre les partis de Benyounès et celui de Ghoul. Le FLN, empêtré dans une crise interne depuis plus d'une année, n'a toujours pas réussi à réconcilier les belligérants. Malgré sa position de première force politique du pays, l'ex-parti unique est fortement marginalisé dans le nouveau gouvernement. Les ministres FLN, qui restent au gouvernement, ne doivent pas leur reconduction au patron du FLN, mais surtout au seul choix du chef de l'Etat. Belkhadem en prend un sacré coup, lui qui est réduit à presque rien, avec son éviction de l'Exécutif, mais aussi sa marginalisation dans la confection du gouvernement Sellal. Ahmed Ouyahia, le patron du RND, n'a pas été consulté, non plus. C'est dire que ces partis ont fait leur temps et que, même s'il leur reste les élections locales pour entretenir les illusions, le nouveau paysage politique qui se dessine risque de se faire sans eux. Mais, de là à dire que ces ex-partis au pouvoir (ou du pouvoir) sont finis, c'est aller vite en besogne. Car les nouveaux partis qu'on propulse n'ont pas encore prouvé quoi que ce soit sur le terrain et il serait prématuré de les juger sur leurs prestations lors des élections de novembre prochain, sachant qu'il leur faut du temps pour se structurer. On le comprend bien : ces partis sont créés pour préparer 2014. Beaucoup plus symbolique, la désignation de leaders de nouveaux partis ne constitue pas pour autant une trouvaille. Car, faut-il le rappeler, Amara Benyounès était déjà ministre, sous la casquette du RCD, tout comme le fut Amar Ghoul, sous les couleurs du MSP. Les deux sont, donc, des ex qui changent seulement de casquette. Mohamed Saïd, quant à lui, a carrément mis son parti au placard, après la déconvenue des législatives. Il revient à ses premières amours : la presse. Une sorte de consolation pour cet opposant soft. Mais un cadeau empoisonné, sachant que le secteur de la communication est le plus instable depuis l'arrivée du président Bouteflika au pouvoir. Printemps arabe oblige, on attendait l'entrée en force des partis islamistes au Parlement. Ce ne fut pas le cas. Le changement, version Bouteflika, s'opérerait à travers de nouveaux partis comme ceux de Ghoul et de Benyounès. A.Z