Romano Prodi, l'envoyé spécial de l'ONU pour le Sahel, a clairement affirmé, jeudi à Alger, sa position sur le Mali. L'option militaire constitue un dernier recours pour libérer le nord de ce pays occupé par les islamistes. L'ultimatum du Conseil de sécurité de l'ONU pour la Cédéao pour l'élaboration du concept stratégique pour le déploiement d'une force armée au Mali a provoqué une sorte d'électrochoc chez les responsables politiques et militaires de la sous-région sahélienne. Si le volet militaire pour lequel a milité et bataillé la communauté de la Cédéao avec le soutien franc de la France a gagné le quitus de l'instance onusienne, les diplomates se sont réveillés pour relancer et intensifier la campagne de sensibilisation autour des conséquences d'une offensive dans la région. Option défendue par l'Algérie qui a présenté une vision pour une solution politique assise sur le dialogue assortie d'une stratégie de développement du Nord-Mali tout en révisant sa position sur l'option militaire qui demeure, selon Alger, une voie de dernier recours. Cette option a trouvé écho auprès d'autres pays du champ, le Niger et la Mauritanie, mais également une légitimité du Conseil de sécurité qui lui consacra dans sa résolution du 12 octobre une ouverture parallèlement à l'adoption de la solution militaire. Début du compte à rebours pour la Cédéao mais surtout pour la diplomatie algérienne afin de convaincre ses partenaires occidentaux, du moins les plus importants, les Etats unis et l'UE, d'adhérer à sa stratégie. Une offensive qui sera payante avec le rapprochement de la position américaine clairement exprimée par la secrétaire d'Etat, Hillary Clinton, le représentant du SG de l'ONU, nommé spécialement pour le Sahel, l'Italien Romano Prodi, reçu jeudi à Alger, a franchement opté pour une solution qui éviterait la guerre. De son côté, la représentante de la diplomatie de l'UE, Mme Ashton, a montré quelques réticences quant au déploiement militaire de la Cédéao tout en assurant de la disposition de l'UE à aider l'armée malienne. Premier perdant, la France, qui a fait de l'intervention militaire par sous-traitance la seule et unique solution, a été “déboutée", l'Onu ayant laissé, malgré le délai étroit, une petite ouverture pour le dialogue inter-malien, et y compris la Cédéao, dont l'empressement à aller en guerre est largement inspiré par Paris, que son médiateur, Balise Compaoré, a reçu une délégation d'Ansar Edine, qui semble avoir accepté les conditions pour les négociations avec Bamako, premier pas vers le dialogue direct avec les autorités maliennes. Une autre délégation du même groupe s'est rendue à Alger avec des préliminaires sur le même ton qu'à Ouagadougou. Le leader d'Ansar Edine devrait faire une déclaration dans les prochains jours pour annoncer officiellement “ses distances" vis-à-vis des groupes terroristes, Aqmi et le Mujao qui occupent deux grandes villes du Nord, Gao et Tombouctou. Reste maintenant le MNLA, qui a perdu tout dans sa conquête du Nord, à convaincre de renoncer à son projet d'indépendance. Et ce sera une issue honorable pour lui, d'autant plus qu'il a perdu du terrain au profit des groupes terroristes et Ansar Edine ainsi que politiquement, son projet étant rejeté par la communauté internationale. S'accrochera-t-il alors à la perche de la stratégie de développement des pays du champ, des engagements des USA et de l'UE qui préconisent une solution durable accompagnée d'un programme de développement socioéconomique pour le Nord-Mali ? En définitive, la France sous Hollande enregistre son premier échec en politique étrangère. Son erreur, au-delà de la diplomatie, est de vouloir engager une guerre par procuration et dont personne ne veut réellement. Et le temps aura enfin donné raison, entre autres, à l'Algérie, présentée au début comme un pays facteur de blocage à la solution préconisée par l'Elysée, qui a plaidé depuis le début de la crise pour une solution politique globale. Pour preuve, l'adhésion d'Ansar Edine à cette démarche dès l'amorce des contacts officiels. D B