En plein froid, 19 familles composées de 95 personnes, dont deux bébés, ont été expulsées de leurs maisons qu'elles occupent depuis 1958. Cela s'est passé avant-hier dans la commune de Boumerdes, au lieudit Sahel. Aucun responsable ni association ne se sont déplacés sur les lieux pour s'enquérir de ce drame, qui a mis en émoi la population, notamment les voisins du site de chalets dit Tchnia. “Hormis le chef de la Sûreté de wilaya qui a reçu des membres des familles expulsées, nos responsables et nos élus semblent préoccupés par les élections, alors que des bébés et des femmes sont jetés dans la rue en plein froid", dira Saïd, un voisin des familles. Sur place, on a été accueilli par Ami Ahmed Boudjelloul et plus de 200 personnes, tous voisins et amis de la famille. Ammi Ahmed, qui représente toute la famille Boudjelloul et qui habite les lieux depuis 1958, nous montre ses enfants grelottant de froid. “Où vais-je mettre ces pauvres petits, ces dizaines de femmes, ces bébés innocents ?", s'interroge-t-il . Et d'ajouter : “On ne nous a même pas donné une tente pour les mettre à l'abri de ce froid glacial. Où sont les droits des enfants ? Où sont les responsables, les candidats des partis, les députés ?" C'est un véritable cri de désespoir qu'a lancé Ammi Ahmed, en prenant à témoin la foule massée devant les maisons cadenassées par l'huissier de justice. Ces familles jetées dans la rue sans ménagement croient dur comme fer que leur expulsion est injuste et illégale. “Nous occupons les lieux depuis 1958 et cette parcelle réclamée par un propriétaire appartient à l'EAC n°2 Ahmed-Malek, elle est donc propriété de l'Etat", affirme Bounous Amar, qui nous exhibe un document justifiant ses dires. “Ce document a été envoyé au président de la République. En plus, l'affaire est toujours pendante au niveau de la justice, puisqu'on est convoqué pour dimanche, alors pourquoi on s'est empressé de nous expulser ?", s'est-il encore interrogé. En effet, dans le document datant du 12 août 2012, qui nous a été remis et qui est signé par le directeur des domaines, il est bien précisé que la parcelle de 71 ares objet de litige et sur laquelle sont érigées plusieurs habitations datant de l'époque coloniale appartient à l'Etat. “Suite à l'enquête menée par les services des domaines, nous vous informons que cette parcelle appartient à l'Etat suivant l'ordonnance 66/102." Le document adressé aux familles expulsées précise que “la parcelle en question a été cédée à l'agence foncière de Boumerdès pour en faire un lotissement destiné aux habitations précaires". Clair, net et précis. “Alors pourquoi s'est-on empressé de jeter ces familles dans la rue et en plein week-end ?", se sont interrogés les voisins. N. O