Le premier président de la Cour suprême défie les personnes doutant de l'indépendance de la justice d'apporter des preuves. Le premier président de la Cour suprême, Kaddour Berradja, n'a pas du tout apprécié les dernières déclarations de Farouk Ksentini, avocat et président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme, sur le fonctionnement de la justice algérienne. Ce dernier avait déclaré que la non-indépendance de la magistrature algérienne reste “un point noir qui entrave l'établissement de l'Etat de droit", soutenant qu'une partie du rapport annuel 2012 sur la situation des droits de l'Homme en Algérie qui sera transmis incessamment au chef de l'Etat remet en cause l'impartialité de la justice dans notre pays et son indépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif. “Le juge algérien prononce ses verdicts en toute liberté et crédibilité", a répliqué, hier, Kaddour Berradja en marge des travaux du colloque “sur le rôle de la jurisprudence judiciaire dans l'évolution du droit". Il ajoute que “la magistrature algérienne est souveraine et personne ne peut parler de l'intervention d'une quelconque partie dans les décisions prises par le juge". D'une virulence qui ne lui est pas coutumière, le premier président de la Cour suprême défie les personnes doutant de l'indépendance de la justice d'apporter des preuves. “Les magistrats prennent leurs décisions en toute liberté et crédibilité. Moi personnellement, je ne me permettrai jamais de donner des instructions aux magistrats sur les verdicts à prononcer, leur conscience demeure le seul arbitre", certifie le premier responsable de la Cour suprême. Seulement, la partialité de la justice n'est pas le seul point abordé par le président de la Commission nationale consultative de promotion et protection des droits de l'Homme. Invité à s'exprimer sur les ondes de la Radio nationale, M. Ksentini qualifie de catastrophiques, dans leur globalité, les réformes de la justice engagées depuis une dizaine d'années. “Ce qui a été mal fait doit être défait", assène-t-il. Il cite, en premier lieu, le code de procédure civile et administrative révisé en 2009. “Je rappelle à haute et intelligible voix que le code de procédure civile et administrative est un texte totalement inadmissible et qu'à l'épreuve du temps, il s'est avéré catastrophique. À mon sens, il faut le retirer et revenir à l'ancien texte en y apportant quelques modifications. De l'avis général, c'est une véritable catastrophe. C'est l'avis des magistrats qui subissent cette loi et des avocats qui la pratiquent. Ce code ne contient que des incohérences alors qu'il a été présenté comme un texte novateur et progressiste. Il n'en est strictement rien". Il aborde, ensuite, un sujet d'actualité, au centre de négociations entre le ministère de la Justice et les avocats. Il aura des mots durs pour décrire le contenu de l'avant-projet de loi relatif à l'exercice de la profession d'avocat. “Cette loi contient deux dispositions complètement débiles ! Elles fragilisent l'avocat et le mettent sous la coupe du procureur de la République alors qu'il n'est qu'une partie au procès. Il faut retirer au procureur la possibilité d'attaquer l'avocat durant l'audience. Nous faisons une profession suffisamment difficile, il n'est pas nécessaire de nous fragiliser plus encore." Il faut savoir que l'ensemble des réformes ayant touché ce secteur sensible ont été conduites par Tayeb Belaïz, ex-ministre de la Justice et depuis quelques mois président du Conseil constitutionnel. Pour l'instant, il n'a pas souhaité commenter les propos de Ksentini. N H