Jaillissement des mots. Voilà un titre qui colle bien au contenu du nouveau recueil de poèmes et de textes libres de 72 pages de Rachid Rezagui, préfacé par l'universitaire Mohamed Lakhdar Maougal, et comportant un portait de l'auteur signé Lounis Aït Aoudia, président de l'association Les amis de la rampe Louni Arezki. Le flot incontrôlable des mots traduits, une réflexion sans concession sur l'histoire contemporaine de l'Algérie. Paru aux éditions Barakat, le recueil qui s'accompagne d'illustrations de l'artiste peintre Karim Sergoua, pour une expression plus complète, permet au poète de présenter sa vision de son pays qu'il aime tant pour ses martyrs, ses “combattantes", son peuple. En racontant sa passion pour l'Algérie, Rachid Rezagui se montre objectif et ne passe rien sous silence. Ni les crispations ni les difficultés qu'il rencontre. Sous sa plume, toutes les contradictions sont mises en avant. Il se montre d'ailleurs sans concession envers les intellectuels censés produire du sens, envers l'école censée produire du savoir et former les générations de demain. Rachid Rezagui met en écho l'Algérie d'hier et celle d'aujourd'hui, et esquisse une réflexion, en filigrane, sur les mécanismes d'une révolution, ainsi que sur ses échecs, ses réussites, et ce que les hommes par la suite en font. Le poète exprime ses colères, sans amertume et sans aigreur, de telle sorte que l'écriture a un effet cathartique. Il dénonce les maux avec des mots justes, simples, tranchants et ô combien révélateurs d'une douleur, d'une blessure béante. Il instille de la nostalgie et place l'humain au centre de sa poésie. Il valorise le peuple, bien souvent méprisé. Il montre, comme l'explique parfaitement M. Maougal dans sa préface, que “la poésie est toujours révolutionnaire". “En remettant le peuple au cœur de la poésie, Rachid Rezagui rappelle le souffle épique des émancipations chèrement acquises et dénonce les crimes gabegiques liberticides qui ont étouffé la voie des éleuthes et des amazones pour laisser la place aux délires cyniques des gorges déployées se riant de la misère humaine et saluant le triomphe éphémère de la basse matérialité bestiale et imbécile", conclut le préfacier. La révolution, telle que pensée et écrite par Rachid Rezagui, [re]donne au langage une force exaltante. La parole et le mot retrouvent leur sens, pour le grand bonheur du lecteur, traversé par plusieurs sentiments. De même qu'on s'incline devant le style de l'auteur et ses engagements, on est souvent interpellés et convoqués en tant que lecteurs pour accompagner le poète dans ses tranchés et réflexions. S K