“Il croit savoir, toutefois, que cette proposition ne fait pas consensus au sein des cercles de décision." Invité hier au Forum hebdomadaire du quotidien Liberté, Me Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (CNCPPDH), a déclaré que l'armée doit protéger la Constitution. “Nous avons suggéré, entre autres, à la commission Bensalah, dans le cadre des réformes initiées par le chef de l'Etat, que l'ANP doit être la gardienne de la Constitution", a-t-il indiqué, avant de préciser qu'il réitère toujours cette proposition. Est-elle une allusion au coup de force opéré en 2009 par l'actuel chef de l'Etat et lancer ainsi un appel du pied à l'armée pour protéger la Constitution contre d'autres coups de force à venir ? Me Ksentini n'en dira pas plus, se limitant à affirmer qu'il “ne veut pas porter de jugement sur les faits passés, mais regarder vers l'avenir". Toujours dans le même ordre d'idées, il a ajouté que le président de la République “est le garant politique de la Constitution", et “comme cela se fait en Turquie, c'est l'armée qui doit la protéger". Il croit savoir, toutefois, que cette proposition ne fait pas consensus au sein des cercles de décision. Interrogé sur le dossier des disparus et la possible réouverture du dossier pour une mission onusienne, Me Ksentini a estimé que, par le passé, “l'Algérie a eu à s'expliquer sur ce dossier". Un dossier, certes, sensible à propos duquel, estime-t-il, l'Algérie “a été sévèrement jugée". La réouverture du dossier par une mission onusienne dont il dit ne pas être au courant est, de l'avis de Me Ksentini, une simple constatation. “Ils peuvent venir constater" car “les dossiers de disparus n'ont pas d'archives", a-t-il révélé. Expliquant encore une fois que ses services ont recensé 7 200 cas de disparitions, il a précisé que les ONG, qui ont fait leur choux gras avec cette histoire de disparus, “prenaient part pour les terroristes". À partir des évènements du 11 septembre 2001, explique-t-il, ces mêmes ONG ont découvert les affres du terrorisme, d'où le changement de leur attitude vis-à-vis de l'Algérie et notamment par rapport à ce dossier. Plus explicite, il a indiqué que “ce n'est pas l'Etat qui est l'auteur de cet état de fait", mais “la terreur imposée par le terrorisme". En outre, il soutient que “les rares cas" amputables aux agents de l'Etat “sont l'œuvre d'agents zélés ou de militaires pris de panique". À propos de ces cas, précise-t-il encore, “l'Etat n'est pas responsable. Il a combattu loyalement le terrorisme", mais “ce sont des dépassement non délibérés". D'autre part, l'invité de Liberté a indiqué que l'Algérie n'était pas l'unique pays au monde qui comptait des disparus. Il cite, à titre d'exemple, le Chili, l'Argentine et le Maroc. Tous ces pays, soutient-t-il, “ont fait recours à l'indemnisation pour résoudre ce problème". Ce que l'Algérie avait fait, rappelle-t-il, à travers les dispositions de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, même si, regrette-t-il, “certaines familles avaient refusé l'offre de l'Etat". Sur un autre registre, Me Ksentini a indiqué que la Charte pour la paix votée par référendum en 2005 n'était plus une question de textes de loi, mais “elle est dans les cœurs des Algériens". Une affirmation à laquelle il ne tardera pas à apporter, lui-même, la contradiction, en soutenant que “des dispositions complémentaires doivent être ajoutées au texte initial". Me Ksentini n'a évoqué, cette fois-ci, ni amnistie générale ni de nouvelles mesures pour les “repentis", mais elles concerneront, entre autres, les autres victimes du terrorisme qui ont perdu des biens durant la décennie noire. “Cela fait dix-sept ans que j'attends cette disposition, moi qui ai perdu tous mes biens durant cette période", a indiqué une des victimes à l'adresse de Me Ksentini. Pour ce dernier, cette disposition doit être incluse rapidement pour aboutir à une réconciliation entre toutes les victimes. Evoquant le rapport de la commission à remettre au président Bouteflika, Me Ksentini a indiqué qu'il sera rendu public au moment opportun. Plusieurs questions liées à l'indépendance de la justice, à la liberté d'expression, aux droits sociaux ont été incluses dans le rapport. “Notre rôle est de constater et non pas de dénoncer", a indiqué l'invité de Liberté, sur les objectifs de ce rapport. M M