Alors que deux présumés coupables ont été interpellés, le viol collectif, jeudi soir, de deux jeunes femmes migrantes, dans des conditions sordides au quartier dit Coca, à l'ouest d'Oran, continue de provoquer des réactions d'indignation et d'agiter le quartier en question où la tension restait vive hier. Le calvaire des deux Maliennes (23 et 26 ans) agressées avec des armes blanches, séquestrées et violées par 4 personnes dans un haouch au cœur de Coca, est bouleversant. Ces migrantes, en situation irrégulière à Oran depuis quelques mois, ce qui leur a valu une incarcération de 7 jours et une condamnation à 6 mois de prison avec sursis pour entrée et séjour irréguliers en Algérie, ont vécu l'horreur cette nuit-là et n'ont dû leur salut qu'à la fuite de l'une d'entre elles. Celle-ci parvenant à s'échapper toute nue, en sautant d'une fenêtre, trouvera refuge auprès d'une famille algérienne qui l'aidera en lui donnant des habits avant de donner l'alerte et de faire fuir les 4 violeurs pour libérer la deuxième migrante. Le soir même, il est un peu plus de 22h30 quand l'une d'entre elles se rend à la brigade de gendarmerie de Yaghmoracen pour y déposer une plainte. Mais ce soir-là, sa plainte ne sera pas enregistrée en raison, selon le commandant de la compagnie de gendarmerie, d'un problème de communication et de compréhension. Ce n'est donc que vendredi après-midi que l'affaire est prise en charge. Les premières mesures pour l'enquête sont prises, notamment l'audition des deux victimes, des témoins ainsi que de deux jeunes hommes, présumés coupables, interpellés au quartier Coca. Une troisième personne, identifiée, est toujours recherchée. Les deux jeunes femmes étaient encore en état de choc au moment de leur audition. A., 26 ans, tente de trouver les mots pour raconter son cauchemar, elle n'y parvient pas et éclate en sanglots, se cachant le visage des deux mains. Péniblement, elle expliquera ensuite comment dans les artères sombres de Coca, des hommes ont assisté à leur kidnapping sans intervenir. Puis, à demi-mots, elle évoque le viol collectif et répétitif, la douleur, le déchirement du corps et de l'âme. Isolées et en situation précaire, leur mésaventure révèle au grand jour la situation de vulnérabilité extrême des migrantes à Oran. Alors que dans des affaires de viol, les 24 premières heures sont déterminantes pour les examens médicaux, ce n'est qu'hier que les deux victimes ont pu voir un médecin légiste à l'hôpital, accompagnées par des membres du bureau local de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (Laddh) dans l'attente des suites de l'enquête et de la confrontation entre les victimes et les présumés violeurs. Au quartier Coca, la tension est perceptible et certains redoutent des actions de représailles à l'encontre des migrants, nombreux dans cet immense no man's land qu'est le quartier Coca, un immense bidonville à l'ouest d'Oran. C'est là que des dizaines de migrants ont trouvé refuge faisant le bonheur des vendeurs de drogue, mais c'est là que vit également une population algérienne exclue, pauvre, marginalisée, côtoyant ou subissant la violence sociale, la délinquance, le trafic de drogue, où le chômage explose littéralement, le tout faisant une zone de non-droit aux portes de la ville. D. L