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Kabylie : comment les “redresseurs” recrutent ?
Publié dans Liberté le 15 - 01 - 2004

La confusion qui règne dans cette région n'a pas empêché les hommes de Abdelkader d'activer.
Ils ne sont pas spécialement du FLN, mais ils se revendiquent de l'ex-parti unique. Les “redresseurs”, loin de raser les murs en Kabylie, s'échinent à arracher un second mandat au président-candidat.
Et la “réanimation” du mouvement de “redressement” du FLN procède de la même logique qui permettrait au président Bouteflika de se maintenir au pouvoir. À Tizi Ouzou, le mouvement des “redresseurs” n'est rien d'autre qu'un conglomérat hétéroclite. Outre quelques militants de l'ex-parti unique, la structure parallèle du FLN est mise en place avec l'aide discrète, mais précieuse du RND, en procédant à des recrutements tous azimuts. D'autres militants d'horizons divers et qui semblent avoir coupé les amarres avec leurs premières amours politiques, sont également appelés à la rescousse.
Si l'actuel mouhafadh des “redresseurs” à Tizi Ouzou, en l'occurrence Saïd Naït Sidi Ahmed, est un militant du FLN qui ne s'inscrit pas dans la nouvelle ligne imprimée par Ali Benflis, il n'en est pas de même pour plusieurs “redresseurs”. C'est le cas, par exemple, de deux confrères et d'un fonctionnaire à l'université Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou. Ce fonctionnaire, qui dit être pour beaucoup dans l'installation de la mouhafadha, n'a jamais fait partie auparavant des structures du FLN. “Je suis derrière le recrutement de plusieurs militants dont huit, au moins, siègent au niveau de la commission composée de 21 membres”, dira notre interlocuteur. Dans la même commission de wilaya, on retrouve un ancien délégué des archs et un représentant de la zaouïa de Sidi Abderrahmane El Illouli de Bouzeguène. D'autres zaouïas sont “courtisées” par le clan présidentiel dans le but d'arracher leur soutien. Plusieurs zaouïas se sont vues ainsi allouer des subventions à l'image de la wilaya de Tizi Ouzou et la zaouïa de Sidi Ali Ouyahia de Boghni, qui a bénéficié d'un million de dinars. D'autres membres du FLN parallèle avouent avoir été recrutés à coup de promesses alléchantes. “Mon salaire ne me permet pas de joindre les deux bouts, surtout que j'ai loué à 9 000 DA un appartement”, avoue un “redresseur” anciennement fonctionnaire dans une institution publique. La députée indépendante de Tizi Ouzou, qui avait, avec deux collègues, rendu publique une motion de soutien à M. Bouteflika, ne semble pas étrangère, elle aussi, à cette nébuleuse des “redresseurs”. Mais cette hétérogénéité de la structure à Tizi Ouzou n'est pas faite pour arranger les choses.
Outre la suspicion que pourrait susciter un tel état de fait, une guéguerre en sourdine semble avoir gagné les rangs des “redresseurs” qui mènent bataille pour le leadership. La guerre menée à la tête du mouvement de “redressement” du FLN par Barkat, Belkhadem et Tou, trois ministres du clan présidentiel, n'a pas manqué de déteindre sur les structures de wilaya du mouvement. C'est ainsi que quatre militants viennent d'être exclus à Tizi Ouzou. On leur reproche des velléités putschistes contre le mouhafadh. Si la mollesse de celui-ci arrange les affaires du chef des “redresseurs”, M. Belkhadem, il n'en est pas de même pour d'autres “redresseurs” qui sous-traitent pour Amar Tou ou Saïd Barkat. Des fellahs endettés ont été également approchés avec la promesses d'effacement de leurs dettes par le ministre de l'Agriculture. En juillet dernier, Hamza Cherif Kamel de l'Onea (Organisation nationale des étudiants algériens) créée en 1999 pour contrer l'Unea qui roule, aujourd'hui, pour le FLN de Benflis, avait contacté un ancien membre du comité de soutien à Mouloud Hamrouche installé en 1999.
Un rendez-vous a été vite arrangé avec Amar Tou, dont la mainmise sur l'Onea est un secret de Polichinelle. Et c'est ce qui a donné, depuis, un embryon au mouvement de “redressement” à Tizi Ouzou. À Béjaïa, les partisans de Bouteflika ruent dans les brancards. L'installation de la mouhafadha du FLN-bis a capoté, puisque deux tendances rivales se revendiquent la paternité. C'est ainsi que l'on a affaire à la même bataille de leadership, à Béjaïa, entre Mme Fourar, députée FLN, et M. Bourouih. Ce dernier accuse sa rivale de ne pas obtempérer à la direction nationale du mouvement de “redressement”. Pour lui, l'aile de Mme Fourar n'est pas représentative. C'est que la rivale de Bourouih est soupçonnée de rouler pour le ministre de l'Agriculture.
Un ex-militant du RND, M. Chikhi, s'est également mis de la partie en rejoignant le clan présidentiel. Ce responsable de l'Onem (Organisation nationale des enfants de moudjahidine), à Béjaïa, accuse Mme Fourar qu'il qualifie de “députée taïwan” de travailler à “isoler les militants du FLN”. Le frère du président de la République, qui a séjourné à plusieurs reprises dans la capitale des Hammadites, a mis à contribution des anciens de l'ACB, (Association citoyenne de Béjaïa). Les partisans de Bouteflika sont également gagnés par des remous, dans la wilaya de Bouira.
Mohamed Seghir Kara, ancien député du FLN et membre du bureau national des “redresseurs” n'évolue plus sur du velours.
Alors qu'il a tenté, le premier, de structurer son mouvement depuis des mois, voilà qu'une autre aile voit le jour pour le contester ouvertement.
Les rangs de cette aile dirigée par Mohamed Saïki se renforcent, puisque Kara qui a nourri l'espoir de se voir nommer sénateur par Bouteflika a été remplacé par Drafli ; “j'ai été recruté par M. Kara, alors je dois lui rester fidèle”, estime un “redresseur” à qui on a fait miroiter des promesses dans le cas où Bouteflika serait réélu. Ainsi les remous, qui secouent le mouvement de “redressement” du FLN, prennent chaque jour de l'ampleur, et la désignation des congressistes risque de fausser les calculs des uns et des autres, et surtout de faire des mécontents.
Y. A.


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