Résumé : Le dîner était succulent. Azad s'était surpassé pour montrer à sa marâtre que la vie sous d'autres cieux l'avait forgé dans tous les domaines. Cette dernière appréciera le décor de son appartement, et les plats qu'il avait préparés. Katia s'était proposée pour l'aider à servir, puis débarrasse la table, tandis qu'il servait le thé. Tahar sourit. Il était heureux de constater que sa femme avait apprécié ce dîner. Au fond, il craignait un malentendu de dernière minute. Mais vraisemblablement, tout se déroulait parfaitement. - Zahia est très avare de compliments, Azad. Azad hoche la tête : - Je l'ai compris. Je suis content que mon dîner ait été apprécié. Zahia repasse une main sur son ventre : - Très apprécié. Je te félicite Azad. Il sourit : - Tout le plaisir est pour moi. Tahar toussote : - Comment vont les affaires. ? Azad hausse les épaules : - Pas mal pour un début, je crois que j'ai eu une chance inouïe de dénicher un appartement si bien situé. Mon enseigne ne passe pas inaperçue. Dès les premiers jours, j'ai pu recevoir des patients. - Quel genre de patients ?, demande Zahia - Des gens qui ont surtout besoin d'être écoutés et orientés. - Tu veux dire des gens qui sont mal dans leur peau... - Si on veut. Mais parfois, je reçois des patients d'un genre un peu particulier. Des gens qui veulent se confier. Ils ont perdu toute confiance en eux, et ne croient plus en rien. - Et tu peux les aider ? Il hoche la tête : - Je fais ce que je peux pour eux. Ce n'est pas facile de comprendre les états d'âme de tout un chacun. Chaque être humain transite au moins une fois dans sa vie par une crise existentielle. Je veux dire un passage à vide. Zahia l'interrompt : - Des gamineries que tout ça ! Tu crois vraiment que tous les humains passent par là ? - Oui. C'est un passage obligé. Mais tout comme pour les maladies physiques, il y a le degré de résistance qui diffère. Ce n'est pas tout le monde qui contracte les mêmes maladies. Il y a même des êtres qui vivent très longtemps sans souffrir du moindre mal. C'est la même chose pour les maladies de l'âme, tout dépend de la résistance de tout un chacun. Un potentiel de prédisposition génétique aussi n'est pas à négliger. Zahia garde le silence. Elle se met à siroter son thé et jette un coup d'œil autour d'elle. Azad aurait juré qu'elle voulait détourner la conversation. C'était le cas, car au bout d'un moment, elle dit : - Ton salon est spacieux. C'est là que tu reçois tes patients ? Je t'imagine derrière ce grand bureau, et faisant face à tes sujets. Il lève la main pour l'interrompre : - Tu n'y es pas. Non. Je préfère être plus près de mes patients. Je les mets à l'aise et les installe sur ce sofa, avant de me mettre à côté d'eux. Il doivent d'abord sentir ma présence, afin que je gagne leur confiance. Le premier contact est toujours le plus convaincant. - Et de quoi parlez-vous au début ? - De tout. Le patient doit se présenter, parler un peu de sa vie privée, puis petit à petit livrer ses secrets. Je détecte alors ses malaises. Parfois des complexes qui remontent à son enfance, et à la vie qu'il a menée. Le subconscient humain est toujours un mystère pour la science. Tu ne pourras jamais imaginer la capacité de refoulement d'un humain, et la force morale qu'il cache en lui- même sans s'en rendre compte. Zahia semblait intéressée par le sujet. Azad est franchement surpris. Il remarque que son père somnolait, la tête retombant en avant, et que Katia avait débarrassé la table et qu'elle devait faire la vaisselle dans la cuisine. Il revint vers sa marâtre et demande : - Depuis quand t'intéresses-tu à la psychologie ? Zahia sursaute : - Je ne m'y intéresse pas à vrai dire. Je voulais juste comprendre certains aspects de cette science qui, selon certains, est aussi vieille que le monde. Azad sourit : - Pas autant que ça. Les Romains et les Grecs avaient compris qu'en dehors de leurs blessures physiques, d'autres douleurs survenaient dans leur esprit. En particulier après une phase exténuante, telles que les guerres, les longs voyages et les rixes tribales. Leurs médecins les plus avisés tentèrent alors de les soigner en les rassurant d'abord moralement sur leur état, afin de les motiver et d'activer leur guérison. La motivation a donné naissance à une sorte de concentration sur soi, et de là commencèrent les premières découvertes de la psychologie. Des siècles plus tard, des savants appuyèrent leurs recherches dans ce domaine par l'expérience de leurs aînés, et pénétrèrent dans le monde mystérieux des tréfonds humains. Sigmund Freud prolongea ses recherches et parvint même à localiser les désirs enfouis, par les rêves, et les réactions involontaires. A l'exemple de Pierre Daco, d'autres chercheurs perfectionnèrent ces découvertes. (À suivre) Y. H.