Après le succès médiatico-politique de la manifestation des chômeurs à Ouargla, la contagion gagne du terrain et toutes les wilayas du Sud s'apprêtent à organiser des manifestations similaires, histoire d'accentuer la pression sur le gouvernement et de l'amener à négocier avec les représentants des chômeurs. Aujourd'hui samedi, c'est Laghouat qui abritera une grande manifestation des jeunes chômeurs, appuyés par les militants des droits de l'Homme et des représentants de la société civile, venus de partout. La semaine prochaine, ce sera au tour d'El-Oued, ensuite Tamanrasset, en attendant la suite. Tahar Belabbès, le coordinateur du Comité national de défense des droits des chômeurs (CNDDC), est déjà sur place. Fatigué, il dormait sur un matelas dans une chambre partagée par plusieurs activistes venus des quatre coins du pays. Pour lui, “nous sommes en train de faire bouger nos bases dans toutes les wilayas pour que le pouvoir accepte de dialoguer avec nous et trouver des solutions à nos problèmes". La contagion qui gagne les wilayas du Sud est, selon lui, une réponse aux tentatives des walis de torpiller notre mouvement à travers les déplacements des députés dans ces régions. D'ailleurs, lundi dernier, des députés ont été chassés de Laghouat. D'autres députés comptent faire une virée, samedi, à Ouargla. Pour Tahar Belabbès, le temps reste aux démonstrations dans la rue, jusqu'à ce que le pouvoir accepte de dialoguer avec les représentants du CNDDC. Cette coordination voudrait être un partenaire incontournable et avoir son mot à dire sur les activités des Agences de l'emploi (Anem). D'ailleurs, la coordination estime que la législation en la matière est à modifier, sachant que l'Anem se contente du rôle d'intermédiaire et n'a aucune autorité en la matière. Estimant que les mesures prises récemment par le gouvernement, en réponse du mouvement de contestation parti de Ouargla, étaient “de la poudre aux yeux", Tahar Belabbes en veut pour preuve ces tentatives de torpiller leur mouvement à travers l'envoi des députés. Sur un ton menaçant, il dira : “Si le pouvoir continue sa fuite en avant, les choses nous échapperont et nos revendications seront, alors, d'ordre politique. S'il le faut, nous le ferons." Lui emboîtant le pas, l'activiste Tarek Mameri se lâche : “Nous souffrons de l'esclavage des sociétés de recrutement créées par les pontes du système au profit de leur progéniture, et nous souffrons du racisme des sociétés étrangères." D'autres délégués témoignent des agissements de ces sociétés de recrutement et estiment qu'il est temps que cette situation cesse. Tous sont logés chez Belkacem Khancha, le coordinateur du CNDDC dans la wilaya de Laghouat. Ce dernier nous fera remarquer que le logement lui avait été attribué l'année dernière par les autorités locales. Ce père de quatre enfants est chômeur. Il se dit confiant quant à la réussite de la manifestation de samedi, arguant que la société civile locale leur apporte son soutien. Il s'attend à une grande affluence lors de cette manifestation qui aura lieu à la place de la Résistance. Tout en insistant sur le caractère pacifiste de la manifestation, il dira que sa coordination n'a pas besoin d'autorisation des autorités locales. D'ailleurs, il affirme que les portes du dialogue entre sa coordination et les responsables locaux sont closes et qu'il revendique un dialogue avec les gens qui décident réellement au niveau du gouvernement. Tout en faisant remarquer que les chômeurs sont perçus comme le déchet de la société, il dira que le mouvement des chômeurs est en train de renverser la vapeur et est en train de s'imposer et de s'affirmer là où les partis politiques ont échoué, c'est-à-dire, dans la rue. “La rue est à nous et la société nous soutient". A. B.