C'est dans l'opacité que se gère la principale source en devises du pays au point où ses graves difficultés cachées à l'opinion publique risquent de mettre en péril à moyen long terme la stabilité du pays. Le scandale Sonatrach 1 révélé à la presse en janvier 2010 n'a pas été sans effet sur les activités de la compagnie pétrolière nationale. Plus de trois ans après l'incarcération de ses vice-présidents Amont et Aval, Belkacem Boumediène et Benamar Zenasmi sans que l'affaire soit jugée, Sonatrach vit toujours un profond malaise de ses cadres. Cette situation est aujourd'hui aggravée par les révélations Sonatrach bis. Elle profite aux compagnies concurrentes. En effet, pendant que les révélations sur la corruption se succèdent, des placards publicitaires de compagnies qataries en vue de recrutements de cadres pétroliers algériens paraissent périodiquement dans nos quotidiens. À cette chasse de compétences algériennes, s'ajoutent les départs de centaines de cadres de Sonatrach outrés par la politique de ressources humaines de leur compagnie et par les scandales de corruption qui ont écorné sérieusement l'image du groupe pétrolier national. Cette hémorragie de compétences risque de freiner son plan de développement doté d'une enveloppe de 80 milliards de dollars (plan 2012- 2016). “Sonatrach manque aujourd'hui crûment de superviseurs forage", confie une source sûre proche de la compagnie. Comment avec ce déficit de personnel très qualifié, on peut rapidement intensifier l'exploration et le développement de gisements et ainsi augmenter nos réserves d'hydrocarbures. En ce sens, il faut rappeler que 40 foreurs parmi les plus compétents et les plus expérimentés ont dû quitter Sonatrach ces dernières années. Comment réaliser les objectifs de ce plan de développement alors que l'appareil de forage national a montré aussi ses limites. “Sur un parc de 80 appareils de forage, seulement 57 sont opérationnels, ce qui est nettement insuffisant", ajoute la même source. Cette situation renvoie à un grave problème de gouvernance guère réglée depuis trois ans. Ceci est d'autant plus grave que l'Algérie enregistre aujourd'hui une chute de ses réserves de pétrole et de gaz et une explosion de la demande en produits énergétiques. Au lieu d'un sursaut en 2010, en 2011, 2012 et 2013, on a assisté à une régression du secteur des hydrocarbures masquée par les recettes en devises engrangées chaque année (plus de 70 milliards de dollars en 2012). Pendant cette période de fragilités, nos meilleurs spécialistes du secteur ont été marginalisés. “Sonatrach est en danger", souligne la même source Et si Sonatrach est en danger, c'est que l'Algérie est en danger. L'urgence est donc de renforcer son management et de combler ses déficits en personnel très qualifié. Par ailleurs, Sonatrach a déjà perdu des parts de marché en Europe en matière de fourniture de gaz. Cette tendance va s'accentuer si on n'accélère pas la mise en service des nouveaux gisements gaziers dans le sud-ouest et le sud-est du pays tout en freinant la demande locale en produits pétroliers. Et si on n'accélère pas la mise en œuvre d'un modèle de consommation énergétique plus rationnel, en un mot moins gaspilleur d'énergie ainsi que le programme de développement des énergies renouvelables, on court plus tôt que prévu vers une grave crise économique et sociale. Car en 2025- 2030, on risque de ne vendre aucune goutte de pétrole et de gaz à l'étranger, face à l'explosion de la demande domestique en produits énergétiques. K. R. Nom Adresse email