Soutenus par les Français, les Marocains ont réussi à dissuader les Américains d'inclure l'enquête sur les droits de l'homme au Sahara occidental dans le mandat de la Minurso, se limitant à évoquer la nécessité d'encourager leur respect. Le Conseil de sécurité des Nations unies votera aujourd'hui une résolution prorogeant le mandat de la Minurso au Sahara occidental, sans y inclure la question des droits de l'homme comme le voulaient les Américains. Ces derniers ont fini par reculer suite aux pressions exercées par le Maroc avec le soutien de la France. En effet, un compromis a été trouvé entre les Etats-Unis et le Maroc sur la question des droits de l'homme au Sahara occidental, Washington abandonnant l'idée de l'inclure formellement dans le mandat de l'ONU, ont indiqué mardi des diplomates. Comme tous les ans, les membres du Conseil de sécurité doivent renouveler avant fin avril le mandat de la Mission des Nations unies au Sahara occidental (Minurso). Les Etats-Unis avaient d'abord présenté un projet de résolution qui chargeait la Minurso d'enquêter sur les droits de l'homme, au grand dam de Rabat. “Les droits de l'homme seront davantage mentionnés dans le texte que l'an dernier et le texte encourage des efforts et des progrès dans ce domaine", a indiqué un diplomate au courant des négociations. “C'est une manière d'avertir les Marocains que la communauté internationale surveille davantage la situation au Sahara occidental", a souligné un autre diplomate. L'an dernier, le Conseil avait prolongé le mandat de la Minurso tout en demandant au Maroc “d'améliorer la situation". Le gouvernement marocain avait réagi très vivement au premier texte américain et a fait pression sur les membres du groupe des amis du Sahara occidental (Etats-Unis, Russie, France, Royaume-Uni, Espagne). C'est ce groupe qui doit soumettre formellement le projet de résolution au Conseil. Rabat avait rejeté “catégoriquement" des “initiatives" visant à “dénaturer le mandat" de la Minurso et un exercice militaire auquel s'apprêtaient à participer 1 400 soldats américains et 900 Marocains avait été reporté sine die. Des organisations de défense des droits de l'homme et un envoyé spécial de l'ONU ont accusé les autorités marocaines de torture de militants sahraouis qui luttent pour l'indépendance du territoire. “C'est une occasion manquée et une déception de voir les Etats-Unis reculer devant les Marocains, qui ont réagi avec excès", a déclaré le directeur pour l'ONU de Human Rights Watch (HRW), Philippe Bolopion. “Le compromis de cette année ne pourra tenir que si le Maroc autorise des visites régulières d'experts des droits de l'homme de l'ONU au Sahara occidental et que l'Algérie fasse de même dans les camps contrôlés par le Polisario autour de Tindouf." Le Front Polisario a salué l'initiative américaine qui prévoyait l'introduction au sein de la Minurso du mécanisme de la surveillance des droits de l'homme au Sahara occidental occupé, et ce, en dépit du retrait de cette mesure du projet de résolution qui sera soumis jeudi prochain au Conseil de sécurité. Dans sa réaction à ce nouveau développement, le représentant sahraoui à l'ONU, Ahmed Boukhari, a déclaré hier à l'APS que l'initiative des Etats-Unis avait été “un grand soutien à la lutte pour la liberté du peuple du Sahara occidental occupé". Le mérite de cette initiative, a-t-il soutenu, “réside dans le fait que les Etats-Unis prennent, particulièrement en considération la question des droits de l'homme du peuple sahraoui, tout en insistant qu'il ne devrait pas y avoir deux poids, deux mesures sur cette question". Qui plus est, a-t-il poursuivi, “l'initiative américaine restera dans le radar aujourd'hui et demain et ne va pas disparaître dans le cadre du suivi par le Conseil de sécurité de la situation des droits de l'homme au Sahara occidental qui sont bafoués d'une manière systématique et cruelle par le Maroc". En fait, en dépit de son retrait du projet de résolution, cette initiative reste autant une “victoire morale" pour la cause sahraouie et la résistance du peuple dans les territoires sahraouis occupés qu'elle émanait de la première puissance mondiale, souligne M. Boukhari. De surcroît, explique-t-il, cette initiative “a jeté toute la lumière" sur la question des droits de l'homme des Sahraouis et a relevé l'urgence pour l'ONU de protéger ces droits avec les moyens qui sont disponibles pour toutes les missions de paix existantes. M T Nom Adresse email