Liberté : Quel constat faites-vous aujourd'hui sur la violence routière ? • Colonel Ayoub : Chaque année, nous assistons, presque impuissants, à une véritable hécatombe sur nos routes. Malgré les dispositifs sécuritaires pour le contrôle et la régulation des flux circulatoires en zones urbaine et rurale, le nombre d'accidents de la circulation ne cesse de croître. Pour la période allant de janvier 2000 à septembre 2002, nous avons enregistré 55 109 accidents, 8 311 morts et 90 635 blessés, comparativement à l'Europe de l'Ouest qui, pour l'année 2001, a enregistré une baisse de -3,9% de morts sur les routes, c'est-à-dire que pendant qu'en Europe, le taux de mortalité lié à la violence routière diminue, nous, nous continuons à comptabiliser de nouvelles victimes chaque année. C'est vous dire que le constat est amer. La route tue chaque année près de 8 500 personnes sans compter les blessés qui, parfois, gardent des handicaps lourds et des séquelles à vie ; l'homme est le principal responsable de ces accidents. Quelles en sont les principales raisons ? • Selon nos statistiques, l'homme est responsable dans plus de 90% des cas, il y a aussi l'état des routes, la vétusté du parc automobile. Vient ensuite le comportement des chauffeurs sur la route : excès de vitesse, non-respect du code de la route, inexpérience. Les accidents les plus fréquents sont causés par de jeunes conducteurs qui ont moins de deux années de permis et maîtrisent mal leur véhicule ; il y a aussi les chauffeurs (routiers, chauffeurs de bus, camionneurs). Chaque mois, nos services dressent un P-V sur l'état et la situation des routes du pays, que nous adressons à l'administration, mais malheureusement, très souvent, nous ne sommes pas écoutés. Les pouvoirs publics sont aussi responsables, les sanctions ne sont pas à la hauteur des délits; il faut rétablir le tribunal de police pour sévir et sanctionner les mauvais conducteurs. Quelles solutions préconisez-vous ? • Plus de répression et des peines plus lourdes. Un chauffeur de minibus qui transporte 13 personnes dans un véhicule aux pneus lisses, sans liquide de freins, celui-là est un criminel, la justice doit le considérer en tant que tel, mais aujourd'hui, il s'en sort à bon compte, des amendes qu'il ne paye pas et la prison avec sursis, cela ne suffit pas pour faire prendre conscience aux gens que c'est véritablement une arme qu'ils ont entre les mains et qui peut ôter la vie. Nous comptons aussi mettre en place une équipe de professionnels, capables avec des moyens scientifiques et physiques, de reconstituer des scènes d'accidents pour apporter la preuve à la justice de la responsabilité de l'automobiliste. Pour nous, il est important de continuer notre travail de sensibilisation et de répression contre ce fléau qui est la violence routière. La sécurité routière est l'une de nos principales missions avec la lutte contre le crime organisé. M. A.