Al Jazzera vit aujourd'hui une grave crise. La chaîne de télévision qatarie a perdu son prestige. En cause: le rejet des islamistes en Egypte, en Tunisie et même en Libye, pays phares des printemps arabes. D'ailleurs même le propriétaire de la CNN arabe a pris un coup. L'émir porte-voix des islamistes n'a-t-il pas cédé le mois dernier son fauteuil à son fils, apparemment moins interventionniste. "Dehors ! Dehors !". Le 9 juillet dernier, les correspondants d'Al Jazeera étaient chassés du Caire. La goutte qui a fait déborder le verre : la couverture des manifestations de pro-Morsi, ouvertement et outrageusement favorable aux Islamistes chassé du pouvoir par l'armée sous la pression de plus de vingt millions d'égyptiens qui avaient exigé dans une pétition la chute du président Morsi qui ne roulait que pour son propre parti des Frères musulmans. En réalité, les publics arabes avaient commencé à se détourner de la chaîne depuis la crise syrienne. L'alignement systématique d'Al Jazeera sur les positions des partis islamistes et des groupes djihadistes présentés comme "révolutionnaire" a fait fuir les téléspectateurs. Selon une enquête d'audience, commandée en février dernier par la chaîne qatarie à un cabinet américain, le nombre de téléspectateurs quotidien de la chaîne avait chuté de 43 à 6 millions dans tout le monde arabe. Une hécatombe que l'émir du Qatar s'est bien gardé de rendre public. Les opinions arabes qui avaient été "ensorcelées" par les pêches enflammés d'Al Jazeera contre leurs régimes, à l'exception des rois et émirs, alimentés par des prédicateurs mercenaires genre Al-Qaradaoui, ont fini par être lassées par ses discours haineux, hors temps et improductifs. Al-Qaradaoui a constitué une vraie arme de destruction massive pour l'image de l'islam dans le monde. Aujourd'hui, qu'il semble loin le temps de l'âge d'or où Al Jazeera était la chaîne phare du monde arabe. Principale porte-voix des révolutions arabes au début 2011, la chaîne qatarie a été l'acteur et accessoirement le témoin privilégié de la chute des dictateurs tunisien, égyptien, libyen et de la descente aux enfers des populations syriennes, au point où Julian Assange, fondateur de Wikileaks, avait pâli de jalousie, de même que Twitter et Facebook. Fondée en 1996 par le cheikh Hamad ben Khalifa Al Thani, celui-là même que Washington a "dégagé" il y a peu pour le remplacer par Tamin son fils, Al Jazeera a fait de son soit disant professionnalisme sa marque de fabrique. Mais son maillage à travers le monde et notamment les théâtres de crises, tensions et conflits et ses moyens high-tech, ont fini par conduire à leurs limites. La chaîne est un moyen de propagande au service du Qatar qui prenait ses ordres à Washington. Si l'audience d'Al Jazeera augmente c'est parce qu'elle apporte de "véritables informations", avait déclaré Hillary Clinton lorsqu'elle sévissait au secrétariat d'état des états-Unis ! Hamad ben Khalifa Al Thani servait copieusement l'opium islamiste aux populations musulmanes. Heureusement que le slogan phare de la chaîne "L'opinion et l'opinion opposée" a fini par éventé par ses propres téléspectateurs qui se sont demandé pourquoi la liberté de ton qui tranchait, il est vrai, avec un environnement médiatique arabo-musulman monolithique et rigoureusement censuré, na jamais concerné les régimes du Golfe ? Les égyptiens ont eux fait savoir brutalement qu'Al Jazeera n'est pas ce média qui incarnait un vrai journalisme arabe, pluriel, moderne et objectif. Que la chaîne était en fin de compte pareille que les autres, plus dangereuse car proche des islamistes et des djihadistes. Son propriétaire le nouvel émir du Qatar est lui aussi revenu l'ivresse du pouvoir géopolitique de son père. Une illusion de pouvoir car Hamad ben Khalifa Al Thani ne fut qu'un simple sous-traitant sur la scène diplomatique mondiale. Avec la chute de popularité d'Al Jazeera, le Qatar a perdu son principal vecteur d'influence et dans le monde arabe. Pour l'histoire, les Algériens ont les premiers rejetés Al Jazeera qui a tenté de s'immiscer dans les affaires de leur pays. L'émergence des réseaux sociaux y est également pour beaucoup dans la perte de la chaîne. D. B Nom Adresse email