"L'accélérateur ne fonctionne pas et ne fonctionnera pas", nous a déclaré, avant-hier, le professeur Tahar Filali, médecin-chef du service d'oncologie médicale (chimiothérapie) au CHU Ibn-Badis de Constantine. Cette déclaration qui sonne comme un désaveu — conforté par les affirmations du Pr Djemaâ, chef de service (radiothérapie), laquelle a également mis en doute l'utilisation prochaine de ce matériel — intervient au lendemain de la mise en service, par le ministre de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, Abdelazziz Ziari, d'un accélérateur au CAC. Le centre en question a, pour rappel, fait l'objet d'une opération de rénovation qui dure depuis plus de cinq ans, alors qu'un autre bâtiment en cours de réalisation est à l'arrêt depuis le mois de février dernier. En effet, le ministre de la Santé, qui était en déplacement dans la capitale de l'Est dans le cadre d'une visite d'inspection de son secteur, a déclaré, lors de la clôture des 1res journées de radiothérapie oncologique, en présence de spécialistes algériens et étrangers, que "la mise en service de l'accélérateur du centre anticancer (CAC) de Constantine est symbolique", mettant ainsi les malades du cancer encore dans l'expectative. En fait, sur les 40 000 nouveaux cas recensés chaque année, la moitié seulement, ou presque, bénéficie d'un traitement. Ils sont dirigés, soit au centre anticancer de Blida ou celui d'Ouargla. Interrogé à ce sujet, le Pr Brihmath Abdesslem, physicien-médical au CAC, nous a affirmé que "l'utilisation de cet accélérateur à haute tension est très difficile et les patients ne pourront pas bénéficier de ce traitement qui est, faut-il le préciser, basé sur l'imagerie, dans un avenir proche". Et d'ajouter : "L'annonce de la mise en service de cet accélérateur n'engage que le ministre." En effet, plusieurs problèmes liés au bon fonctionnement de ce matériel qui a coûté 350 millions de dinars, importé des Etats-Unis en 2012, doivent être réglés avant d'être opérationnel à 100% de ses capacités. Selon notre interlocuteur : "D'ici quelques semaines — et seulement si tout va bien — nous pourrons le mettre en service mais avec les moyens du bord." Autrement dit, en utilisant l'ancien scanner 2D. Or, en utilisant un scanner 3D, nous obtenons de meilleurs résultats. Le professeur Brihmath nous explique, par ailleurs, que pour que la machine soit opérationnelle, "il faudra faire fonctionner deux sources d'énergie qui ne répondent pas à ses besoins". "Les anciennes machines fonctionnaient avec le cobalt et puisque la matière utilisée est hautement radioactive et peut causer une catastrophe, il faut des spécialistes pour le démantèlement des sources de cobalt", explique encore le Pr Brihmath Abdesslem. Avant de poursuivre : "L'installation des deux accélérateurs à basse tension, prévue d'ici au 1er trimestre de l'année 2014, ne peut se faire avant le démantèlement de ces sources". Dans le même registre, le Pr Brihmat a évoqué, lors de l'entretien qu'il nous a accordé hier, dans son bureau au CHU, un autre point noir qui empêche le fonctionnement de l'accélérateur. Il s'agit du scanner 3D qui accompagne ce genre de matériel. "Une réunion s'est tenue il y a quelques jours pour acquérir un scanner 3D avec une assiette financière de 6 milliards. Or, nous avons fait la commande il y a plus d'un an. Autrement dit, le dossier est resté en suspens au niveau du ministère de la Santé et celui des Finances", accuse notre interlocuteur. Le spécialiste qui nous a fait visiter l'accélérateur n'a pas manqué de nous préciser que l'appareil chargé de mesurer les profils des patients ne fonctionne pas et a, donc, besoin d'une mise a jour. "L'appareil chargé de cette opération se trouve encore au port de Skikda", affirme-t-il. S'agissant de la formation spécialisée CAC pour l'utilisation de l'accélérateur, le Pr Brihmat nous dira que cette dernière ne débute qu'aujourd'hui, encadrée par un formateur de la société américaine Varian."On ne pourra pas donner de rendez-vous immédiats puisqu'on ne pourra pas supporter la charge, même après la formation, très peu de malades seront pris en charge", conclut-il. S. B Nom Adresse email