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La révolution de mon père 21e partie
Publié dans Liberté le 13 - 10 - 2013

Résumé : Après le repas, Si Ahmed s'occupera des blessés. Nous procédons au changement des pansements. Kheira arrive au camp. C'était la sœur de Belkacem. Elle avait reçu des éclats de grenade au bras, et était partie se reposer dans un village. Malgré sa blessure pas encore totalement refermée, Kheira était revenue au camp où elle savait qu'on avait besoin de ses services.
Kheira devait être du même âge que Fatiha...Elle avait des traits fins et les cheveux noir corbeau. À peine parmi nous qu'elle se met au travail. On l'avait chargée des corvées ménagères, c'est-à-dire de l'entretien des lieux et de la cuisine.
Si Ahmed et moi avions terminé de changer les pansements des blessés. Il tâte le pouls de certains malades et me donne des instructions pour un suivi régulier.
Les premiers blessés se remettaient assez bien, mais les seconds pouvaient à peine contenir leurs cris de douleur.
Kheira revint vers nous pour reposer sa question :
-Je peux vous donner un coup de
main ?
Si Ahmed lui sourit :
-Non... Plutôt un coup de pied... Je vais sortir un moment. Da Belaïd et Amar sont fatigués pour faire leur ronde habituelle, et Belkacem est descendu au village...
-Si Lakhdar est toujours aux
frontières ?
-Bien sûr, c'est grâce à lui que nous avons pu avoir du renfort... Et ton bras, comment va-t-il ?
Elle portait encore un pansement à l'avant-bras, mais tentait de le camoufler sous la manche de son pull :
-Mon bras va très bien... Je ne veux pas rester à l'écart...
Si Ahmed lui prend le bras et défait le pansement :
-Les plaies se referment bien, mais la cicatrisation n'est pas encore complète... Kheira tu ne devrais pas...
Elle retire son bras et l'interrompt :
-Je devine la suite... De grâce Si Ahmed, je sais ce que je dois faire.
-Mais tu n'es pas encore...
Elle hoche la tête :
-Oui, je ne suis pas complètement remise, je risque des infections, des pics de fièvre.
Tu vois que je connais la chanson. Allons, il n'y a rien à faire pour cette fois-ci... Je refuse de redescendre au village.
Si Ahmed tendit l'index vers elle :
-Ma foi, tu es bien plus têtue qu'une mule... Mais gare à toi ! Si tes plaies s'infectent, je serais obligé de te couper le bras.
Elle allait riposter, mais aucun son ne sortira de sa bouche. Elle hausse alors les épaules et s'éloigne sans plus attendre.
Si Ahmed se retourne vers moi en souriant :
-Après la guerre, ce sont les femmes qu'il faut affronter. Elles sont toutes pareilles, aussi têtues les unes que les autres.
Il me donne une tape dans le dos :
-Tu apprendras tout ça plus tard... Allons rejoindre les autres.
Je m'attarde encore un peu auprès des blessés qui avaient besoin de ma présence. On commençait à s'habituer à moi, et on m'interpellait comme un vieil ami à tout bout de champ. Ce qui m'emplissait d'aise et me rendait fier.
Je donne à boire aux uns, et à manger aux autres. Si Ahmed m'avait donné des consignes strictes, et je devais les respecter.
Kheira discutait à voix basse avec Fatiha qui finalement n'avait pas quitté l'abri.
Kheira aussi avait fait son marché. Elle avait ramené des victuailles de première nécessité. Des légumes secs, des pâtes, de la semoule et du beurre frais. C'était tout ce qu'elle pouvait transporter, vu que son bras droit était encore invalide.
Mais c'était un grand courage de sa part que de traverser la forêt en pleine nuit avec un sac chargé sur son dos et une mitraillette qu'elle tenait sous son bras gauche.
Certes, elle ne portait pas de treillis, mais une femme seule, au milieu des loups, n'était pas une proie difficile.
Kheira connaissait les lieux.
Elle s'était familiarisée avec la région et avait tissé des liens d'amitié dans tous les villages environnants.
À l'instar de Fatiha, elle circulait sans encombre partout où elle passait, sans pour autant relâcher sa vigilance. Déguisée en paysanne ou en bergère, elle savait se faire passer pour une villageoise sans trop de mal.
Je m'approche des deux femmes pour demander :
-Puis-je avoir un peu de café ?
Fatiha me tendit sa tasse :
-Bien sûr jeune homme...
Je prends une gorgée et lui rendis la tasse avant de lancer :
-Je ne sais pas si je pourrais faire quelque chose en dehors du paramédical, mais si je dois vous donner un coup de main, n'hésitez pas à le demander... Je ne fais que tourner en rond à l'intérieur de ce refuge.
Fatiha sourit :
-Chacun de nous a une tâche précise, mais on se départage aussi certaines corvées comme la vaisselle ou la lessive... ça te dit de faire des travaux ménagers ?
-Je ferais ce que je pourrais.
Je ne connais pas grand-chose pour le moment.
Kheira m'interrompt :
-Mais si, tu connais... J'ai vu comment tu parlais aux blessés. Ce n'est pas tout le monde qui a ta patience et ton savoir-faire.
Continue donc à t'acquitter de ta tâche. Pour le reste, on verra.
-Il veut combattre au front, lance Fatiha. Il est pressé de sentir le sifflement des balles à ses oreilles.
Elle rit :
-Il sera toujours temps pour toi, Boualem, de tâter le terrain. Ne sois donc pas impatient.
(À suivre)
Y. H.
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