La question relative aux droits de retransmission des compétitions sportives, particulièrement le football, et les débats où se focalisent sur ce domaine les professionnels de l'audiovisuel, du droit et du sport ces dernières années, m'obligent à contribuer, par l'apport de quelques éléments d'informations complémentaires relatifs à ce sujet communément appelé "les droits sportifs". En effet, nous avons eu l'honneur et le plaisir d'avoir suivi avec intérêt l'évolution de son traitement sur la scène internationale d'abord en Europe, ensuite dans le monde arabe et récemment en Afrique. Son traitement s'est fait successivement et respectivement aux niveaux de l'Union européenne de radiotélévision(UER), de l'Union des radios et télévision arabes(ASBU) et de l'Union africaine de radiodiffusion (UAR) ex-Urtna.Les mêmes problèmes ont été rencontrés et débattus avec le même intérêt et la même acuité aux niveaux des trois continents. En Europe Le sujet fut longuement débattu au niveau de l'UER pour trouver les voies et moyens juridiques pour la prise en charge du problème épineux de détention de droits exclusifs sur les évènements sportifs par certaines firmes ou groupes qui se sont spécialisées dans l'achat et la vente de droits sportifs telles que Kirch , Darmon.... Au niveau européen, cette question est, en grande partie, prise en charge par un texte appelé "Convention télévisions sans frontières TSF" qui oblige l'ensemble des Etats membres. La disposition principale est la suivante : Article 9 bis – Accès du public à des événements d'importance majeure. 1)Chaque Partie conserve le droit de prendre des mesures pour assurer qu'un radiodiffuseur relevant de sa compétence ne retransmette pas d'une manière exclusive des événements qu'elle juge d'une importance majeure pour la société d'une façon qui prive une partie substantielle du public de cette Partie de la possibilité de suivre ces événements en direct ou en différé sur une télévision à accès libre. Dans ce contexte, la Partie concernée peut avoir recours à l'établissement d'une liste des événements désignés qu'elle juge d'une importance majeure pour la société. 2)Les parties s'assurent par les moyens appropriés, en respectant les garanties juridiques offertes par la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et, le cas échéant, par la Constitution nationale, qu'un radiodiffuseur relevant de leur compétence exerce les droits exclusifs qu'il a achetés après la date d'entrée en vigueur du protocole d'amendement à la Convention européenne sur la télévision transfrontière. La Partie mettant en œuvre les mesures mentionnées au paragraphe 1 établit une liste d'événements, nationaux ou non nationaux, qu'elle juge d'une importance majeure pour la société ; Critères d'élaboration des listes d'événements : Les critères servant à déterminer si un événement a "une importance majeure pour la société dans un Etat membre" doivent nécessairement dériver des circonstances qui prévalent dans le pays concerné. La Commission européenne suggérait auparavant qu'au moins deux des conditions suivantes fussent remplies : -l'événement a une résonance générale toute particulière, c'est-à-dire pas seulement pour ceux qui le suivent habituellement ; -il a une importance distincte, en particulier comme catalyseur de l'identité nationale ; -il implique l'équipe nationale ou les représentants de la nation; ou -il a toujours été diffusé à la télévision à accès libre et a attiré un public nombreux. Les "événements majeurs" se caractérisent par l'importance qu'ils revêtent pour la société dans un pays donné. Par conséquent, le principe qui doit guider la mise en œuvre et L'interprétation de l'article 3 (a) de la directive Télévision sans frontières (et de l'article 9 bis de la Convention du Conseil de l'Europe sur la télévision transfrontière) se résume en ces mots: les intérêts des téléspectateurs. Le 1er contentieux a opposé un détenteur exclusif de droits sportifs(Kirch) à la Commission européenne. Quid des griefs du Groupe Kirch? En février 2001, le fait mérite d'être rappelé, le Groupe Kirch a traduit la Commission européenne devant le Tribunal de première instance pour le motif que celle-ci avait accepté les mesures prises au Royaume-Uni (où sont considérés comme des événements désignés tous les matches de finale de la Coupe de monde de football). Non seulement le Groupe Kirch alléguait que ces mesures ne respectaient pas, entre autres, les principes généraux du droit communautaire tels que la liberté de faire du commerce et la libre concurrence dans le marché intérieur, mais encore accusait-il la Commission de négliger la protection d'attentes légitimes et le principe de non rétroactivité puisque ces mesures pouvaient s'appliquer aux droits que le Groupe Kirch avait achetés avant l'entrée en vigueur des mesures britanniques ou de l'article 3 (a) de la directive TSF. Dans le monde arabe Droits de retransmission d'événements sportifs majeurs L'Algérie en tant que membre actif de l'Union arabe de radiotélévision (ASBU) en vue de s'inspirer de la directive Télévision sans frontière adoptée par la Commission européenne en vigueur au niveau de l'Union européenne de Radio-Télévision, à l'effet de réguler la diffusion par satellites des chaînes arabes. La réflexion a fait ressortir un vide juridique en la matière dans le domaine de la communication audiovisuelle arabe (Ligue arabe et ASBU), ce qui a permis de constater que le contenu diffusé par les chaînes TV arabes n'obéit à aucune règle écrite contrairement aux chaînes TV européennes qui sont régies par une directive européenne dénommée "Directive Télévision Sans Frontière". La réflexion a conclu à une principale suggestion consistant à initier une proposition arabe de réglementation de la diffusion des programmes TV par les chaînes arabes. La problématique d'ordre juridique qui se pose consiste en l'absence d'un parlement arabe ou africain à l'instar du parlement européen ! - Tenant compte de la proposition de l'Algérie au niveau de l'ASBU (l'Union des Radio-Télévision arabes), union sous l'égide de la Ligue arabe et qui initie les textes et procédures audiovisuelles auprès du Conseil des ministres arabes de l'Information, a été retenue la proposition de réglementer ce domaine d'activité à l'instar de ce qui se passe en Europe par un texte équivalent. L'une des dispositions contenues dans le projet texte, soumis à la Ligue arabe, par le canal de l'ASBU, porte sur les droits de retransmission d'événements sportifs. Le texte a été approuvé et adopté par le Conseil des ministres arabes lors de sa session extraordinaire des 12 et 13 février 2008. Ce texte qui s'inspire grandement de la convention européenne en la matière a été approuvé par l'ensemble des ministres arabes de l'Information à l'exception du Qatar, qui, conscient des visées de ce texte vis-à-vis de la chaîne Al Jazeera, a émis une réserve. Il convient de signaler que le texte réglemente également la question relative à l'exclusivité des droits sportifs que détiennent certaines chaînes arabes à caractère sportif (ART, Al Jazeera Sport actuellement, etc.), à l'effet de gérer et prévoir les impacts et effets négatifs sur le sport, comme nous l'avons déjà vécu lors de la Coupe du monde 2006 où l'exclusivité détenue par ART a privé le téléspectateur arabe en général et algérien de suivre ce grand événement sportif (voir article 5 parag. 5 du document élaboré par la commission permanente de l'information ). l Mécanisme de mise en œuvre du document portant principes d'organisation de la Radiodiffusion par satellite dans la zone arabe, adopté par le Conseil des ministres arabes de l'Information – session extraordinaire – Siège de la Ligue arabe 12 et 13 février 2008. l Le Conseil des ministres arabes de l'Information a adopté le document et a chargé la commission permanente de l'information de proposer les mécanismes et procédures d'application. l Les modalités et procédures de mise en œuvre ont été examinées lors de la 41e session ordinaire du Conseil des ministres arabes de l'Information. à ce titre, il a été demandé au secrétariat de la Ligue arabe de ventiler le document portant principes généraux de la radiodiffusion par satellite auprès de l'ensemble des ministres arabes de l'Information en vue de proposer, chacun, les voies et moyens de procédures et modalités de mise en œuvre pratique des principes généraux contenus dans ce document. Ce document intitulé "Principes de radiodiffusion par satellite" de la Ligue arabe est resté sans application, du fait qu'il n'engage aucun état arabe, mais demeure tout de même un document de référence. La même démarche, je suppose, est reprise au niveau de l'UAR où le Qatar (Al Jazeera sport) n'est pas membre, donc n'est pas obligé par les textes d'UAR ni ceux de l'ASBU d'ailleurs. T. B. (*) (Juriste spécialisé en communication audiovisuelle) Nom Adresse email