Ce qui ressort des communications des participants, jeudi dernier, à ce colloque organisé, dans le cadre du 18e Sila, par le Cnrpah, est que l'Afrique fait face à différents défis. Mais les Africains sont en possession d'une incroyable richesse, notamment sur le plan culturel, et qui se transmet dans la littérature et les arts de manière générale. Le Salon international du livre d'Alger (Sila) s'accompagne, depuis deux éditions, d'un colloque international portant sur un thème lié au monde de la recherche, de l'édition, et à des enjeux culturels et géostratégiques. Cette année, et pour la 18e édition du Sila, le Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques (Cnrpah) a organisé, sous l'égide du ministère de la Culture, un colloque international de deux jours (jeudi et vendredi), intitulé "l'Afrique dans les littératures et les arts". Pour aborder l'Afrique, ce continent qui fait face à différents défis, et qui compose avec une culture ancestrale, un douloureux héritage colonial et des aspirations à la modernité, un comité scientifique, composé de Slimane Hachi, Benaouda Lebdai, Amina Azza Bekkat et Abdelhamid Bourayou, a délimité des axes de réflexion. Après l'ouverture officielle du colloque, où M. Hachi, directeur du Cnrpah, a souligné que "l'Afrique et le panafricanisme constituent une option stratégique pour l'Algérie", la séance inaugurale s'est articulée autour d'une formidable communication de Valentin-Yves Mudimbe, professeur à l'université de Duke (USA). Poète, romancier, essayiste, universitaire, chercheur, M. Mudimbe a fait part de son expérience dans le monde universitaire et des liens qui existent entre les différentes disciplines liées au savoir, dans une édifiante communication intitulée "Au nom de décence. Un témoignage concernant une pratique subjective dans la configuration contemporaine", à travers laquelle il a souligné son ancrage dans la culture africaine, tout en se revendiquant des grands courants de pensée universelle. Une méditation qui l'a, entre autres, fait dire que "mon passé est grec et pas seulement grec, mon passé est africain et pas seulement africain". Lorsqu'Amina Azza Bekkat lui demandera ce qu'est, pour lui, un intellectuel africain, V. Y. Mudimbe soulignera : "Que signifie exactement intellectuel africain ? Les géographes nous ont habitués à séparer en trois Afrique : l'Afrique du Nord, l'Afrique subsaharienne et l'Afrique du Sud." Pour répondre à cette question, M. Mudimbe dira qu'il faudrait également tenir compte des facteurs sociaux et historiques, et qu'aujourd'hui, contrairement au passé où les intellectuels étaient investis d'une mission, il existe différentes formes d'engagement : "Engagement politique, engagement personnel (famille, choix religieux)". "Je pense que la plupart des intellectuels africains vous répondraient ‘que voulez-vous dire', et je crois que c'est la meilleure réponse", lancera-t-il. Par la suite, quatre chercheurs ont animé la première séance du colloque, présidée par Afifa Brerhi, notamment Julien Kilanga (université d'Angers), Abderrahmane Arab (université d'Alger), Victor Bouadjio (éditeur et écrivain), et Benaouda Lebdai (université du Maine, Le Mans). Julien Kilanga, dont la communication avait pour intitulé "Cultures et langues africaines face aux défis de l'intégration et de la mondialisation", a soutenu qu'actuellement, l'Afrique a trois options ou trois modèles de société multiculturelle, qui représenteraient son salut dans un monde en souffrance : le modèle de tolérance, le multiculturalisme respectueux de la différence et le modèle d'identité mixte. Pour lui, "la diversité culturelle et linguistique pourraient permettre à l'Afrique de vivre dans la mondialisation. L'Afrique doit choisir de se réformer et de mettre en œuvre les moyens pour cela". Abderrahmane Arab a présenté un exposé édifiant, dans une communication intitulée "L'Afrique dans la langue de l'Autre : entre bovarysme et irrédentisme", sur la littérature durant la colonisation et postindépendance, et le rapport qu'entretiennent les écrivains avec la langue, estimant que "nous sommes toujours liés à la langue", avec un sentiment "d'inachevé et de quelque chose qui ne sera jamais entier", et cette volonté qu'ont eu et qu'ont toujours les écrivains africains d'"annexer la langue". Il affirmera, plus tard, que les écrivains se sont investis de la mission "d'un recouvrement de l'identité" en même temps que celui de la liberté. Pour lui, par exemple, le roman Meursault, contre-enquête (éditions Barzakh, 2013) de Kamel Daoud parachève cette écriture, qui s'exprime par la stylistique, avec la métafiction, le carnavalesque, la parodie, etc., marquée par le passé par le réalisme critique et le réalisme social. Benaouda Lebdai s'est intéressé, quant à lui, à la littérature sud-africaine postapartheid, dont les mythes fondateurs que sont la dénonciation de la violence et de l'antiracisme sont au centre de la fiction romanesque. S K Nom Adresse email