Hier, les mouhafedhs ont appelé Bouteflika à se représenter pour un quatrième mandat. Pourtant, réunis autour de Saâdani, ils étaient censés détenir l'information à la source ! Bouteflika est candidat, c'est, même, le candidat du FLN. Et c'est leur secrétaire général qui le claironne sans cesse. Si, en sa présence, ils se sont tout de même astreints à rédiger un appel à candidature à l'adresse du Président, c'est que Saâdani n'est pas si au fait qu'il le prétend des intentions de l'actuel chef de l'Etat. Ce n'était peut-être qu'un pari sur l'avenir. Le sien, bien entendu. Il rejoint donc les rangs, nombreux, de ceux qui appellent de leurs vœux la perpétuation du régime qui leur assure la rente de la stabilité : les indus occupants des institutions, les spéculateurs de l'informel, les zaouïas... Les mouhafedhs du FLN viennent de jouer comme une fausse note dans le concert inlassable de tous ceux qui, depuis des mois, se relaient pour nous convaincre que la question du quatrième mandat est tranchée. Pourtant, plus personne n'invoque l'argument de l'article 78 ni n'appelle à la réhabilitation du principe de l'alternance au pouvoir. D'ailleurs, pas plus tard que l'avant-veille, Sellal, la voix autorisée concurrente, rassurait les zaouïas : "Bouteflika ne partira pas et les zaouïas resteront !", a-t-il martelé. Pourquoi donc "les rentiers de la stabilité" commencent-ils alors à s'impatienter au point d'oser le presser de présenter les amendements à la Constitution "dans les plus brefs délais" ? Il faut croire que le silence de Bouteflika commence à désespérer ses alliés et ses soutiens plus qu'il ne préoccupe ses adversaires et ses détracteurs. On remarquera aussi que même le recours à la controverse sur l'état de santé du Président est de plus en plus le fait de ses partisans. Djamel Ould-Abbès, présent parmi les mouhafedhs, a ainsi ressorti l'argument massue, clamant : "Le Président va très bien !" Il serait donc inconcevable qu'un Bouteflika en bonne santé puisse céder la place à un successeur. Visiblement, nous nous trouvons dans un cas de figure jamais "décrit", comme disent les médecins. Ce n'est plus une dictature où les militaires désignent "le candidat du consensus" et ce n'est pas une démocratie où s'exerce pleinement la volonté populaire. Les concepteurs de cette forme d'"Etat civil" n'ont pas prévu la situation d'alternance et, n'ayant pas de scénario préétabli, ils paniquent. C'est Sellal qui a déclaré à Sétif que "le changement est inéluctable", mais qu'il doit se faire "dans l'ordre". Or, on le voit bien, le régime, qui ne peut concevoir une évolution démocratique, n'arrive pas à imaginer l'autre "ordre", le sien, qui puisse lui assurer la transition vers lui-même. Il n'arrive pas à imaginer un "ordre" sans Bouteflika. L'espèce de précampagne agitée, d'ailleurs riche en télescopages, est probablement l'expression d'une panne absolue d'un régime jusqu'ici convaincu du fait que l'occupation des institutions, la répression et l'argent du pétrole devraient suffire à contrarier le sens de l'Histoire. M. H. [email protected] Nom Adresse email