Comédienne et metteure en scène, elle est l'une des figures emblématiques du 4e art en Tunisie. Fondatrice, en 2002, et gérante de la société professionnelle Masrah Ennas Tounès (Théâtre pour tous de Tunisie), elle a présenté à Béjaïa (lors de la 5e édition du Festival international du théâtre) sa pièce Madha law mata dhili (Et si mon ombre mourait). Cette dame de fer qui fait de son talent artistique une arme contre l'intolérance et l'intégrisme religieux a bien voulu répondre à nos questions. Liberté : Pouvez-vous nous résumer l'histoire de votre pièce ? Dalila Meftahi : L'histoire évoque la rencontre entre le passé et le présent. C'est de la purification. Autrement dit, c'est pour qui sonne le glas. Il s'avère que le temps joue en notre faveur, eu égard à la situation actuelle. On a parlé aussi de feu Chokri Belaïd, comment a-t-il été tué, et El djarad (Criquets) qui a déjà sévi en Algérie. C'est une espèce qui n'aime pas la vie. Or le message de la pièce, c'est tout à fait le contraire : il faut aimer la vie. En plus, toute femme est Elissa, toute femme est Chahrazed, toute femme est mère courage. Et nous en avons beaucoup. Mais nous avons Hayet et Dounia, chacune est différente de l'autre. Hayet, c'est ma vie, tandis que Dounia, c'est la vie. Personnellement, je préfère réussir la vie que de réussir dans la vie. Donc il faut sauver la vie. Nos deux comédiennes, Hayet et Dounia, ne sont pas des ratées, mais rejetées. Elles se préparent pour un casting en vue de participer à un film historique. Il leur faut une séquence du théâtre classique. Elissa, Chahrazed et mère courage ce sont trois personnages qui sont entrés dans l'histoire, par contre nous, nous n'avons pas marqué l'histoire, on l'a ratée. À la fin de la pièce, les deux comédiennes ont été spoliées de leurs valises. Que veut dire un tel geste ? Cela veut dire que les deux comédiennes ont été privées de vie par ceux qui se sont emparés de leurs valises. Les valises représentent leur vie, car elles contiennent leurs habits, leurs documents et autres objets de valeur. Cela veut dire que le théâtre est la vie. Dans le dictionnaire, c'est le grand cinéma. Comment avez-vous eu l'idée de monter cette pièce ? La pièce, c'est mon idée, alors que le texte est écrit par mon collaborateur Ibrahim Benamer. J'ai une troupe privée avec qui je travaille depuis la création, en 2002, de ma société professionnelle du théâtre Masrah Ennas Tounès (Théâtre pour tous de Tunisie). L'œuvre a connu un écho favorable en Algérie. C'est sa 4e présentation, après Batna, Skikda et Annaba. Votre combat ne s'inscrit-il pas dans une orientation politique ? Non. Je ne fais pas de politique partisane, mais je fais du théâtre. C'est dans ce cadre-là que je mène mon combat contre l'obscurantisme de ces fanatiques rétrogrades qui ne jurent que par la violence. Ce sont eux les partisans du Jihad sexuel qui promettent le paradis aux femmes enlevées et violées. Croyez-vous à la victoire de la démocratie en Tunisie ? Je ne crois pas à la démocratie dans les pays arabes. Les expériences vécues par certains pays arabes nous ont démontré que la démocratie n'arrive pas à s'instaurer. Beaucoup de sang a coulé à cause des criquets noirs qui pullulent dans la région. Nous avons perdu la bataille, certes, mais n'avons pas encore perdu la guerre. Ce n'est que partie remise. Nous avons 150 sociétés professionnelles de théâtre en Tunisie, lesquelles produisent pas moins de 150 pièces par an. Donc ils ne pourront jamais nous faire taire. La Tunisie est, certes, en crise politique, mais le théâtre n'est pas en crise. La preuve est que nous sommes toujours là. K .O Nom Adresse email