Il aura fallu une catastrophe nationale pour qu'il sorte de sa réserve. Mais, la sortie du président de la République était beaucoup plus dictée par le danger qui guettait la stabilité du pays et qui menaçait son rempart le plus fort : l'Armée. Sans le savoir — ou sans le vouloir ? — Amar Saâdani, par son irresponsabilité politique, avait fait le sale boulot pour le compte de clans qui se croient tout permis, en vue d'imposer leurs visions en avril prochain. En sonnant la fin de la récréation en tant que président de la République, ministre de la Défense, Bouteflika s'est voulu clair : ce n'est pas lui qui est derrière les attaques contre le DRS et son patron et il désapprouve cette façon de faire, en ce qu'elle comporte comme gros risques sur la stabilité et la crédibilité du pays. On savait que le président Bouteflika ne portait pas dans son cœur l'actuel patron imposé à la tête du FLN, et ce, depuis qu'il présidait l'APN, et on savait que ce dernier avait, maintes fois, demandé audience au chef de l'Etat, sans avoir été reçu, mais qui, alors, a imposé Saâdani à la tête du FLN, sachant que Bouteflika est toujours son président d'honneur ? En laissant faire et agir un Saâdani dont les frasques et les casseroles sont un secret de polichinelle, le Président donnait l'impression de cautionner un tel personnage. Or, la dernière sortie du patron temporaire du FLN ne pouvait rester sans suite. Il est allé loin, trop loin, au point que le Président soit obligé de s'exprimer et de mettre un terme à cette guerre larvée que se livrent, depuis des mois déjà, des clans aux intérêts visiblement opposés, pour le contrôle futur du pays. Se présentant comme garant de la stabilité du pays et de l'unité de son Armée, le Président a dû rappeler à Saâdani que la loi interdit de s'attaquer aux institutions du pays, l'Armée en premier. Est-ce à dire que la justice va faire son travail et invoquer les articles qui punissent ce genre de dépassements ? Fort probable. Tout comme il est fort probable que le sort de Saâdani à la tête du FLN soit déjà scellé et que ses opposants, emmenés par Belayat, puissent tenir, au plus vite, leur session du comité central pour élire un nouveau secrétaire général du parti. En tout cas, il est clair que les choses devraient bouger dans les prochains jours. À en croire le président Bouteflika, la crise suscitée par les déclarations de Saâdani serait la plus grave que le pays ait connue depuis l'Indépendance. Plus grave que la décennie noire ? Visiblement oui, selon le chef de l'Etat. Et l'on imagine mal un Saâdani qui serait capable, à lui seul, de provoquer une crise d'une telle gravité. Alors, faut-il s'attendre à ce que de gros poissons tombent ? Ou est-ce qu'on calme le jeu, on range les armes et on attend une autre occasion pour reprendre les hostilités ? Au-delà des répercussions de la dernière sortie de Saâdani, force est de constater que le pays se trouve à la croisée des chemins à la veille d'un scrutin décisif, mais qui reste entouré de nombreux points d'interrogations. C'est que tout le pays retient son souffle et attend que le président Bouteflika annonce, enfin, son intention de briguer ou non un quatrième mandat. Et c'est cette situation, cet attentisme, cette absence de perspectives claires, qui font le plus peur et qui font sortir de leurs tanières tous les protagonistes, anciens et nouveaux, dans une sorte de guerre de succession qui ne dit toujours pas son nom. A. B Nom Adresse email