En dehors des périodes de crise qui ont jalonné l'histoire de l'Algérie indépendante, où elle a dû monter au front pour défendre la République, c'est probablement la première fois, à l'occasion de cette élection présidentielle, que l'institution militaire se retrouve ainsi, malgré elle, au cœur du débat politique contradictoire. Chacun des nombreux acteurs qui ont sollicité son intervention ces derniers mois lui a taillé un rôle à la mesure de ses offres politiques afin de l'impliquer dans le processus de mutation du système. Des offres politiques, il y en a eu, émanant à la fois de personnalités civiles et de militaires à la retraite. Autant d'appels du pied, s'ils traduisent en creux l'importance de cette institution dans l'imaginaire politique algérien et son "incontournabilité", n'en constituent pas moins dans le même temps une pression insoutenable sur elle. Pression d'autant plus dangereuse qu'elle est l'ultime rempart. Dans le dernier éditorial de sa revue El-Djeïch, "la grande muette" s'est sentie en devoir de parler. Parler pour renvoyer dos à dos tous les demandeurs et quémandeurs et revendiquer simplement sa stricte mission, telle que définie dans la Constitution, au moment où l'Algérie a un rendez-vous avec les urnes jeudi pour l'élection du président de la République. Tout en soulignant sa "cohésion" et son "homogénéité", réponse subliminale à ceux qui postulent l'existence de fractures et des césures en son sein, elle assure qu'elle veillera à sécuriser "avec force, volonté et détermination" le déroulement du scrutin jeudi. Les mots sont clairs et sont destinés à ceux qui auraient des velléités de troubler l'ordre public, au lendemain de la proclamation des résultats de l'élection, au cas où la fraude serait avérée. Comme sont dénoncées, le mot est fort, les "voix qui, partant d'intérêts étroits et mues par la volonté de s'adonner à des règlements de comptes personnels, se sont élevées pour appeler publiquement l'ANP à violer la Constitution et la loi afin qu'elles puissent mettre en exécution les complots fomentés contre l'Algérie et son peuple". Et dans cette mise au point les terroristes ne sont pas en reste, encore moins eux, l'armée promettant d'en "débarrasser définitivement le pays". En somme, l'édito d'El-Djeïch se donne à lire comme une sorte de passage en revue dans lequel l'institution militaire rappelle chacun à ses limites. Nom Adresse email