Cette longue marche est jalonnée d'abord par le martyre de cette corporation qui a perdu plus d'une centaine de journalistes, des hauts faits d'armes professionnels qui la distinguent par rapport aux autres pays arabes et africains et des interrogations par rapport à son avenir. Vingt-trois ans sont passés après la rencontre de Windhoek (Namibie) pour le développement d'une presse africaine indépendante et pluraliste, tenue du 29 avril au 3 mai 1991, dont la déclaration finale avait abouti à l'instauration par les Nations unies, en décembre 1993, de la Journée mondiale de la liberté de la presse. Dans notre pays, la presse "indépendante et pluraliste" était née un peu plus tôt, en 1990. Une convulsion des évènements douloureux d'Octobre 1988. Depuis, le nombre de titres privés s'est multiplié. Mais dans le même temps les sacrifices des journalistes furent terribles. Etant la cible privilégiée de la nébuleuse terroriste sévissant durant cette même période, la corporation a payé un très lourd tribut. Les assassinats en série des intellectuels en général et des journalistes en particulier, accusés par les fondamentalistes d'"ennemis de l'islam", emporteront plus d'une centaine de confrères entre 1993 et 1998. L'auteur des Vigiles, l'un des grands écrivains algériens et journaliste, Tahar Djaout, fut le premier à tomber sous les balles de la horde islamiste, le 26 mai 1993. Depuis, les meurtres s'enchaîneront durant les années 1990. Une sorte de "génocide programmé" contre les journalistes accusés de "mener une guerre médiatique contre le djihad islamique". Si on ne peut pas énumérer la longue liste des victimes, en revanche, on ne doit en aucun cas négliger leur sacrifice, sans lequel le recouvrement de la "stabilité", chantée aujourd'hui par le pouvoir, n'aurait certainement pas été possible... Mais, qu'en est-il de l'aboutissement de leur combat pour la liberté de la presse, deux décennies après ? Sur ce plan, aujourd'hui on ne doit pas se voiler la face : il reste encore un long chemin à parcourir. Il faut dire que la réalité de la presse nationale s'éloigne dangereusement des aspirations de nos aînés qui se sont sacrifiés pour qu'elle existe. Le classement mondial de la liberté de la presse de 2014, établi par Reporters sans frontières, donne l'Algérie à la 121e place sur un ensemble de 180 pays. Avec quatre places de gagnées par rapport au classement de 2013, (125e), l'Algérie arrive à peine à surclasser le Mali (122e) qui, lui, vient de perdre 22 places suite à la crise interne affectant ce pays depuis 2011. Certes, sur le plan quantitatif, l'Algérie reste l'un des rares pays à compter plus de 170 titres quotidiens et des dizaines d'hebdomadaires et autres magazines, mais force est de reconnaître que la qualité de nos médias laisse encore à désirer. Les quelques titres de la presse écrite, qui font des efforts pour réussir un produit acceptable, eux, semblent comme "noyés" dans une multitude de journaux qui "envahissent" de plus en plus les kiosques. Plus de vingt ans après la consécration de la Journée mondiale de la liberté de la presse, la presse nationale, dite indépendante, reste encore sous l'emprise des cercles d'influence. Mais aussi sous le monopole de l'Etat dont l'agence de publicité (Anep) distribuant la publicité institutionnelle reste l'arme de dissuasion rapide... F. A. Nom Adresse email