Comme les défilés de mode, l'information a aussi ses collections printemps-été. Celle de cette année est monopolisée par le drame des lycéennes nigérianes qui vient remplacer la collection hiver de Crimée. Quant à la Libye, personne ne va se risquer à donner une explication. Parce que ce qui se passe dans cette région de l'Afrique n'intéresse personne. Et les rares qui s'y intéressent ont abandonné l'affaire car ils n'y comprennent plus rien. Car la Libye, ce n'est plus sexy. BHL a fait son film et l'a montré au Festival de Cannes, et Sarkozy est plus préoccupé par les valises de billets qu'on lui reproche d'avoir empochés de la part de l'ancien homme fort de Tripoli, qui commence a être le très "regretté" Kadhafi. Pourtant, ce qui se joue dans cette partie du globe focalise les appétits. Alors que l'Etat libyen est un vague souvenir, les acteurs surarmés se démultiplient. Ainsi, à Benghazi, une nouvelle armée a vu le jour (ANL) d'un général Khalifa Haftar, qui a eu la bonne idée d'habiter près de vingt ans pas loin du QG de la CIA avant de revenir en Libye, s'est mis dans l'idée de chasser Ansar al-Charia, franchise d'Al-Qaïda sur place, et qui a eu, il y a deux ans, la mauvaise idée d'assassiner un ambassadeur américain. Dans cette bataille qui paraît avoir son pesant de noblesse, ce qui reste d'une armée libyenne, bric-à-brac incertain de soldats sous-formés et de miliciens surarmés, a décidé de renvoyer les deux belligérants dos à dos et appellent à l'instauration d'un zone d'"exclusion aérienne". Quand on sait que les quelques Mirages français que possédait Kadhafi n'ont même pas pu lui sauver la peau, on comprend que les vociférations de Tripoli face à Benghazi ne sont là que pour la galerie. Alors que les Américains, avec leur pragmatisme pétrolier, s'inquiètent que les miliciens se transforment en exportateurs de brut et que les Français sont plus inquiets par rapport au Sud-Est libyen (appelé "Nid de vipères" par Le Drian), car leurs gisements d'uranium au Niger sont doublement exposés, l'Algérie est happée dans ce chaos sans nom en voyant ses diplomates, encore une fois, menacés de kidnapping. Car dans ces guerres géostratégiques, il y a des guerres plus personnelles, comme celle que mène Mokhtar Belmokhtar contre l'Algérie et qui a trouvé dans la profondeur libyenne matière à développement. Et même si Alger avait eu raison de prévenir de l'instabilité chronique libyenne, rejointe sur le tard par Paris et Washington, les menaces qui pèsent sur le peu d'intérêts de l'Algérie en Libye dénotent qu'on est devenu une cible comme une autre. Nom Adresse email