Face à la croissance de la demande domestique en produits énergétiques — 12 à 13%/an pour l'électricité et 15 à 20% pour les carburants — ainsi que la baisse de ses exportations, l'Algérie a décidé d'opter pour l'exploitation du gaz de schiste. Car son potentiel dans cette ressource non conventionnelle s'avère important. L'Algérie est riche en gaz de schiste, reconnaissent différentes agences internationales spécialisées dans le secteur énergétique. En l'occurrence, "l'Agence américaine de l'énergie classe, en mai 2013, l'Algérie à la troisième place dans le monde en matière de ressources en gaz de schiste : 707 tcf, derrière la Chine (1115 tcf ) et l'Argentine (802 tcf) et devant les Etats-Unis (665 tcf), soit 10% des ressources mondiales : 7299 tcf". Dans un entretien accordé à El Moudjahid, le ministre de l'Energie, Youcef Yousfi, indique que les ressources en gaz de schiste techniquement récupérables sont de 1 000 tcf, soit 28 000 milliards de mètres cubes. Alnaft, l'Agence nationale de valorisation des hydrocarbures, évalue, elle, ces ressources à 27 000 milliards de mètres cubes. Dans 6 sur 7 bassins, il existe aussi du pétrole de schiste et du condensat. On les évalue à 5,7 milliards de barils, à comparer avec les 12 milliards de barils de réserves prouvées de pétrole. "Les ressources de gaz de schiste sont réparties sur 7 bassins. Le plus important, Berkine, recèle 282,3 tcf et 4,37 milliards de barils de pétrole de schiste. Les bassins du Sud-Ouest recèlent également des ressources importantes en gaz de schiste : Timimoun (152,5 tcf), Reggane (120,8 tcf), Ahnet (59,9 tcf) et Tindouf (26 tcf). Illizi au Sud-Est et Mouydir dans le Sahara central recèlent respectivement 55,7 tcf et 9,5 tcf." Mais il ne faut pas confondre entre ressources et réserves prouvées. Il convient de multiplier les forages pour identifier les accumulations de gaz et cerner, de manière précise, les quantités d'hydrocarbures gazeux contenues dans les réservoirs. "La confirmation de ces ressources repose sur une énorme logistique à mettre en place au cours des 50 prochaines années. Alnaft estime à 300 milliards de dollars, dont 230 milliards de dollars pour les forages, les investissements nécessaires pour extraire ces quantités de gaz durant les 5 prochaines décennies pour atteindre un niveau de production de 60 milliards de mètres cubes/an de gaz à partir de 2024. Cela nécessitera le forage de 12 000 puits durant la période, 240 puits par an. En un mot, cela induira la multiplication des appareils de forage." Pour l'expert Terkmani, il s'agit d'une surestimation de la production. En tout état de cause, toute une organisation logistique est à mettre en place. Or, l'Algérie ne dispose que de 70 appareils de forage alors qu'il en faudrait des centaines. Il faudra former plusieurs équipes de foreurs. "Or, Sonatrach a arrêté ce type de formation (du moins pas développé ces formations)", confie une source proche de Sonatrach. "Comme les coûts de l'exploitation du gaz de schiste sont plus élevés que le gaz conventionnel, 7 à 12 dollars le million de BTU au Royaume-Uni (estimation ) alors qu'il est vendu à 3 dollars le million de BTU aux Etats-Unis, un problème de rentabilité se pose dans l'extraction du gaz de schiste qui peut être réglé plus ou moins par la présence de liquides associés (GPL et condensat) ou d'hydrocarbures liquides à proximité : pétrole de schiste. Beaucoup plus chers, ces liquides permettent d'améliorer l'économie du projet. Permettront-ils de rentabiliser le gaz de schiste en Algérie ? En d'autres termes, les contraintes à l'exploitation du gaz de schiste sont les faibles marges bénéficiaires, les coûts élevés de production des ressources et la volatilité des prix. Telle est l'une des conclusions d'une table ronde organisée en septembre 2013 à Alger sur le management de la chaîne logistique des gaz non conventionnels." À cela s'ajoutent les problèmes d'environnement liés à l'exploitation du gaz de schiste. L'utilisation de la fracturation hydraulique pour extraire le gaz de schiste présente des risques de pollution de la nappe phréatique et des sols en raison de l'usage des additifs chimiques toxiques dans les fluides de forage. Ces aléas montrent que l'exploitation de gaz de schiste ne deviendra intéressante en Algérie que dans 10-15 ans. En attendant, les priorités sont ailleurs. K. R. Nom Adresse email