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Il veut mettre fin aux abus et aux positions de rente
Hamid Grine préconise un "cercle vertueux"
Publié dans Liberté le 14 - 06 - 2014

Nommé il y a à peine quelques semaines, le nouveau ministre de la Communication continue de plus belle ses effets d'annonce.
Hamid Grine a encore déploré, jeudi matin, à l'Ecole supérieure de journalisme de Ben Aknoun, à Alger, le "manque de professionnalisme" de la presse algérienne.
En insistant sur le volet formation, il révélera en marge d'une conférence portant sur "l'éthique et la déontologie" animée par le journaliste français d'origine algérienne, Rachid Arhab, qu'il avait été notifié aux éditeurs de consacrer au moins 2% de leurs bénéfices à la formation des journalistes, soit exactement "trois fois rien", commente un confrère. L'expression est suffisamment significative pour qu'elle vaille d'être signalée. Selon notre confrère, le ministre a voulu, soit faire de l'humour, soit mettre en exergue le peu d'empressement qui caractérise certains éditeurs pour le développement de leurs entreprises dont ils tirent, néanmoins, de substantiels profits. Une manière de leur rappeler, sans doute, subtilement certaines valeurs. Et ce n'est pas tout ! Pour enfoncer le clou, le ministre n'a pas hésité à dénoncer une situation socioprofessionnelle "humiliante" pour certaines catégories de journalistes, notamment dans la presse privée, au regard des niveaux de salaires pratiqués conjuguée parfois à l'absence de couverture sociale.
Le ministre a fait savoir, à cette occasion, qu'une correspondance a déjà été adressée en ce sens aux éditeurs et a laissé entendre que, dans le cas échéant, des mesures seront prises. Autre chantier et non des moindres pour Hamid Grine : il veut enclencher un "cercle vertueux" où se retrouverait l'ensemble des acteurs impliqués dans la chaîne de production de l'information, notamment le triptyque (éditeurs, annonceurs, journalistes). Telle est la prescription du "docteur" Grine pour extirper le mal qui mine la corporation qui, à l'entendre, est l'otage d'un cercle vicieux. Le minimum auquel doivent s'astreindre, selon lui, les différents intervenants est le respect des "règles éthiques" qu'ils doivent désormais observer sous peine de sanctions financières.
En effet, le ministre a appelé les annonceurs à confier leurs budgets publicitaires uniquement aux supports qui respectent les droits légitimes de leurs journalistes et qui ne versent pas dans la diffamation. Ce n'est donc plus seulement la sanction du marché ou l'audience qui va déterminer le choix du support, mais aussi son aptitude à se plier à la déontologie professionnelle. Sur ce point précis, il est à craindre que cette proposition en vienne à ouvrir la voie aux règlements de comptes politiques et à contrarier certaines lignes éditoriales assez critiques vis-à-vis du pouvoir. De ce point de vue, et pour des raisons évidentes, les annonceurs iraient inévitablement vers le "politiquement correct". Le ministre qui dit "ne pas croire à l'objectivité mais à l'exactitude" a repris alors les propos du Président Bouteflika au sujet des dérives que sont la calomnie, la diffamation et la médisance. "Nous sommes pour la liberté d'expression et non pour la liberté d'insulter", a-t-il souligné. Pour sa part, Rachid Arhab a estimé que l'éthique, ce sont les valeurs personnelles alors que la déontologie, ce sont les valeurs admises. "Doit-on aller vers une forme d'autorégulation ou laisser aux autres le soin de juger ?", s'est-il interrogé, non sans pertinence. "La frontière entre la presse d'opinion et la presse généraliste est très ténue", avoue-t-il avant d'afficher la couleur : "C'est un métier terriblement individualiste. Je suis un enfant de la télévision publique. Mon opinion à moi n'a pas d'importance, c'est celle du plus grand nombre qui compte." Quand bien même la question déontologique ne serait toujours pas tranchée, cette figure du JT français considère toutefois que ce n'est pas seulement une question de textes mais surtout de comportements.
Ayant été un ancien membre du Conseil supérieur de l'audiovisuel français (CSA), la présence de Rachid Arhab à Alger rappelle qu'en ce moment même le gouvernement planche sur le dossier des autorités de régulation dans la presse écrite et dans l'audiovisuel.
Pour Rachid Arhab qui prenait ce jeudi la première fois la parole en public dans son pays natal, il n'est pas certain que le modèle français (ou européen) puisse être facilement transposé en Algérie, et ce, d'autant qu'il est déjà inspiré par d'autres pays précurseurs dans ce domaine comme la Belgique ou encore le Canada.
M-C. L.
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