Les Touareg de l'Ahaggar, sous la houlette de leur chef spirituel, l'amenokal Edaber Ahmed, se sont réunis, avant-hier, à la Maison de la culture de Tamanrasset, pour exprimer leur ras-le-bol et dénoncer la politique de "l'exclusion" et "la hogra" dont ils se sentent victimes. Dans une salle archicomble, les notables et chefs d'une quarantaine de tribus ont exigé des hautes autorités du pays la reconnaissance officielle de l'autorité traditionnelle de l'amenokal en rappelant de sa précieuse contribution à l'édification d'une Algérie post-indépendante, ainsi qu'à la préservation de l'intégrité territoriale. "L'autorité traditionnelle, ou ce que fut la confédération des Touareg, a joué un rôle prépondérant dans la stabilité du pays du fait qu'elle servait de passerelle de communication entre les pouvoirs publics et la société civile, notamment durant la décennie noire. En effet, durant cette période, l'Etat a fait appel aux chefs de tribu pour consolider les rangs dans la lutte contre le terrorisme et l'extrémisme qui avaient souillé le sang de nos martyrs. Toutefois, avec le rétablissement de la paix et après que l'Algérie eut retrouvé sa place sur la scène internationale, l'Etat semble tourner le dos aux notables qui se sentent délaissés. Cette marginalisation voulue et préméditée a malheureusement donné libre cours aux opportunistes qui s'arrogent le droit de parler au nom des Touareg de l'Ahaggar. Inacceptable !", regrettent-ils en rappelant que si cette région du Grand-Sud, plus exposée aux menaces et aux manipulations étrangères, s'est jusque-là immunisée contre la fièvre du Sahel, c'est grâce à l'union des Touareg, connus pour leur nationalisme. "Nous n'avons pas besoin de récompense, mais de reconnaissance pour mettre un terme aux arrivistes et aux notables importés qui ont l'entregent de se prendre pour des représentants des Touareg de l'Ahaggar. Or, la dégradation de la situation sécuritaire, politique et économique de la région ne tolère nullement ce genre d'agissements que les peuples de cette wilaya de 10 000 ans récusent vivement", ont-ils ajouté. Evoquant le volet politique, les intervenants, qui se sont relayés dans la grande salle Dassine, étaient unanimes à exiger un quota de postes permanents concernant les fonctions supérieurs, directeurs de l'exécutif, responsables centraux et ministres. Ils ont aussi exigé de prendre en considération les compétences et les qualifications des cadres de la région lors de la désignation des walis, des ambassadeurs et des diplomates. À ce titre, ils ont également insisté sur la priorité de promouvoir les cadres locaux aux postes supérieurs à l'effet d'éviter l'affectation des gestionnaires incompétents ou, comme à l'accoutumée, faire de la wilaya un champ d'expérience pour nombre de directeurs novices. Le problème de la langue amazighe n'est pas en reste, puisqu'ils ont demandé son officialisation et son écriture en tifinagh. Au volet du développement local, les représentants des Touareg de l'Ahaggar, tout en exigeant de mener une enquête sérieuse et profonde sur les graves dépassements enregistrés par les élus locaux, ont mis l'accent sur la réalisation des infrastructures en fonction des besoins réels de la wilaya et dans le but d'améliorer le cadre de vie des citoyens. Pour ce qui est de la répartition de la richesse, les notables insistent à ce que le facteur de la superficie soit pris en considération afin de pouvoir remédier aux épineux problèmes endurés par la société locale. Il faut aussi promouvoir le tourisme, qui reste un secteur pourvoyeur de richesses et de postes d'emploi. Au moment où nous mettons sous presse, les Touareg de Tamanrasset attendent l'arrivée du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, qui doit effectuer une visite de travail aujourd'hui dans la commune frontalière d'In Gezzam. Le Premier ministre aura à entendre beaucoup de mécontents qui réclament leur part du développement et d'honorer les engagements pris avant l'élection présidentielle. R. K.