La qualité de la justice a été débattue longuement, hier, lors d'un séminaire organisé par le ministère de tutelle et le Centre de recherches juridiques et judiciaires. On a beaucoup dit sur le sujet, sauf l'essentiel, c'est-à-dire la réalité des arcanes de la justice algérienne, ses tares et ses avatars. Les conférenciers, dont le procureur général près la cour d'Alger, Belkacem Zeghmati, un président de chambre au Conseil d'Etat, des cadres du ministère de la Justice et des magistrats ont insisté sur ce que devrait être le système judiciaire sans établir, au préalable, un diagnostic franc sur ce qu'il est et ce dont il souffre. Paradoxalement, un état des lieux non exhaustif est fait par un président de chambre à la Cour de cassation française, Jean-Paul Jean, de la situation en France et, accessoirement, en Europe. Il a livré, à l'occasion, les résultats d'une enquête réalisée sur les attentes des préjudiciables. À ce titre, il a affirmé qu'ils exigent un raccourcissement des délais de traitement des affaires, à être mieux informés sur les procédures judiciaires et à obtenir des jugements compréhensifs et facilement exécutables. "Tous les systèmes de justice dans le monde sont confrontés au même problème : comment rendre des jugements de qualité et équitables quand les tribunaux sont débordés par le nombre des affaires", a-t-il abordé, en poursuivant que l'on commence à accorder de plus en plus d'importance au différentiel entre le nombre des dossiers bouclés et celui des affaires entrées dans l'année au niveau des greffes des tribunaux pour "savoir si le stock s'épuise ou si l'on doit faire subir aux préjudiciables des attentes supplémentaires". Du côté des intervenants algériens, l'accent est également mis sur la nécessité de réduire les retards mis dans la conduite des audiences et les verdicts. "La rapidité dans le traitement d'une affaire ne doit évidemment pas être confondue avec précipitation", a précisé Ahmed Chafaï, directeur général du Centre de recherches juridiques et judiciaires. Pour le procureur général près la cour d'Alger, "la qualité de la justice est une notion diffuse". La mesure est donnée, selon lui, par le citoyen qui évalue le rapport entre la prestation du service public et ses attentes. Ne s'aventurant nullement à sérier les graves dysfonctionnements de la justice et du système judiciaire en Algérie, il s'est focalisé sur l'inadaptation des structures abritant les institutions judiciaires. "Nous n'avons pas d'espaces sur lesquels nous pouvons avoir des services d'accueil efficaces", a-t-il signalé, avant de soutenir que la majorité des agents de guichets, au niveau des tribunaux et cours, n'ont pas le profil requis pour les fonctions conférées au poste. Le constat est édifiant dès lors qu'aussi bien les experts nationaux que français se sont accordés à souligner que le fondement d'une justice de qualité est l'accès facile à l'information judiciaire. Medjadj Mustapha, magistrat, a suppléé l'absence du directeur général de la modernisation de la justice au ministère de tutelle, pour parler des projets du secteur en la matière. Il a, ainsi, informé qu'un système d'information sur les mandats d'arrêt a été mis en place : "La justice utilise le réseau du ministère des Affaires étrangères pour rechercher les Algériens établis à l'étranger et les étrangers ayant résidé en Algérie." Il a évoqué, en outre, l'exploitation d'un système de gestion du dossier judiciaire du début à la fin de la procédure et aussi de l'étape d'exécution des décisions de justice. "La centralisation des bases de données sur le dossier judiciaire et la population carcérale est en chantier. C'est une priorité pour le ministère de la Justice", a-t-il ajouté.