Jeudi, en soirée, l'Union des écrivains algériens a organisé une veillée. Veillée funeste où des hyènes se délectaient, sous formes d'“écrivains” et d'invités, des épanchements venimeux du triste Tahar Ouattar sur “les cadavres encerclés” de nos auteurs assassinés par les islamistes. Mi-kasma mi-sarriya, cette officine a toujours été le repaire d'écrivailleurs en mal de reconnaissance. Vieilles filles ignorées du monde littéraire, ils croient compenser leur défaut de talent par leur rancune. Au cours de cette veillée funeste, Tahar Ouattar s'est, une nouvelle fois, livré à son exercice favori : justifier les assassinats islamistes des intellectuels. Pourquoi se mettrait-il en reste ? La vogue est d'outrager la mémoire des plus éclairés : ce sont deux anciens chefs de l'Etat qui ont, à nouveau, ouvert le bal des vampires. L'islamiste de circonstance, qui a su opportunément “se ranger” quand il était devenu risqué d'être soi-même, trouve tout à fait justifié l'assassinat de Tahar Djaout et Alloula qui, dit-il, “n'ont pas pris les précautions nécessaires”, c'est-à-dire, comme lui, porter la barbe et hurler avec les loups. La haine de Ouattar semble embrasser tous les écrivains dont la notoriété contraste avec l'obscurité dans laquelle l'a plongé son pacte avec l'obscurantisme. Il a donc réitéré le commentaire maladroitement fielleux à l'encontre de Rachid Mimouni, “une perte pour l'Algérie, mais aussi pour la France”. Mimouni, comme Feraoun, Mammeri, Kateb et Djaout, est effectivement une perte pour la France aussi. Mais pas seulement. Il suffit de savoir qu'il est traduit dans une vingtaine de langues : Mimouni est une perte pour l'humanité. Et je trouve un motif de fierté dans le fait que son œuvre ait dépassé nos frontières et que la littérature francophone, malgré le foisonnement d'auteurs de qualité, regrette l'absence prématurée d'un Mimouni. Il n'y a finalement que la mesquinerie et la perversion d'un Ouattar pour s'en réjouir. Qu'il continue à écrire pour les indigents que l'idéologie baâthiste, à laquelle il s'est convertie sur le tard et par poltronnerie, lui offre comme lecteurs. Ouattar, c'est la confirmation de la théorie balzacienne des correspondances : à le voir, on devine que son âme aussi manque de brillance et de beauté ; il hait donc tout naturellement ce dont il est dépourvu. À l'union des “écrivains”, on doit penser, comme pensent les médiocres, que c'est la présence de talents qui est à l'origine de leur imperfection. C'est presque compréhensible, s'il n'était inadmissible qu'une organisation légale, jouissant de subsides publics, se réunisse ainsi pour célébrer la liquidation de nos meilleurs esprits. Mais notre pays n'est pas à sa première compromission : nous savons depuis Belaïd Abdeslam et Sassi Lamouri que l'appel au meurtre peuvent impunément s'exprimer à partir des structures les plus autorisées. C'est le seul Etat au monde où l'apologie du crime est non seulement tolérée mais souvent souscrite au budget public. Quand tout le système est conçu pour que la bêtise survive à l'intelligence, pourquoi s'étonner que la contribution culturelle de nos écrivains ratés mais “cartés” consiste en l'animation de danses du scalp ? M. H.