Le 3 décembre 1994, Saïd Mekbel est assassiné alors qu'il déjeunait tranquillement en pensant à son Mesmar J'ha du lendemain. Huit ans après, l'image de cet homme tranquille, au sourire charmeur, au regard biaisé au ras de ses lunettes, ce regard paternel avec lequel il gratifiait les journalistes qui travaillaient avec lui, est fortement présente dans les esprits. L'homme à la plume dérangeante n'est pas parti, sa silhouette hante encore les couloirs des rédactions prêt à encourager les uns, à soutenir les autres comme il le faisait autrefois dans ces pénibles moments où sévissait un terrorisme barbare qui n'a pas cessé de planifier des deuils et des souffrances. Certes, les années les plus noires sont derrière nous, et le deuil doit se taire pour céder place à la paix intérieure avant tout, mais face à l'amnistie, il n y aura jamais d'amnésie. Car c'est une partie de nous- mêmes, de nos rêves et de notre jeunesse qui nous a été volée durant ces années, c'est la vie de nos amis, collègues qui nous a été usurpée, et face à notre tragédie, reste l'entretien de la mémoire, et cette mémoire refuse l'abnégation car elle renferme des souvenirs et des visages précieux comme celui de Saïd Mekbel qui restera à jamais le symbole d'une belle lutte. N.B.