574 564 candidats, 1 673 centres d'examen, 613 millions de dinars de subvention, 94 sujets… sont les chiffres phares de la cuvée 2004. Depuis trois ans au moins, les sessions du baccalauréat se suivent et se ressemblent. Non pas qu'elles soient ordinaires, mais justement parce que les épreuves, hypothéquées pour différentes raisons, constituent le dénouement au forceps de situations houleuses. Fait unique, l'année dernière, le bac avait été reporté dans le Centre du pays à l'automne, pour cause de tremblement de terre. En 2001, les examens se sont déroulés en deux sessions. À l'origine de cette double programmation, une revendication des lycéens de Kabylie affectés par les évènements dramatiques du Printemps noir. Une contestation sociale, de moindre ampleur cette année, celle des enseignants du secondaire, s'est également répercutée sur l'organisation de ce rendez-vous crucial. En effet, c'est aujourd'hui seulement que les centaines de milliers de postulants rejoindront les centres d'examen. La date du 26 juin, arrêtée par le ministère de l'Education nationale est le fruit d'un compromis fastidieux avec les syndicats des enseignants et les parents d'élèves. Parties prenantes d'un conflit sans fin, les trois protagonistes ont tenu l'opinion publique en haleine durant toute l'année scolaire, mais les principaux acteurs sont évidemment les enseignants. Affranchis de la tutelle syndicale de l'UGTA, ils ont décidé dès la rentrée de paralyser les lycées. Leur objectif étant de faire valoir leur statut socioprofessionnel. Deux organisations autonomes, nouvellement créées, ont piloté le mouvement de contestation. L'une est régionale (le Conseil des lycées d'Alger-CLA) et l'autre nationale (le Conseil national des professeurs de l'enseignement secondaire et technique-Cnapest). La grève qu'elles ont déclenchée quasiment sur tout le territoire national s'est prolongée tout au long du premier trimestre. En dépit des mesures de rétorsion — retenues sur salaires, menaces de licenciement et de poursuites…) — des pouvoirs publics, les grévistes ont maintenu le cap durant plusieurs semaines. Si la solidarité des parents d'élèves était manifeste durant les premiers jours de la protestation, la radicalisation du mouvement des enseignants l'a définitivement entamée. Pris en otage d'une guerre sans fin, les prétendants au bac commençaient également à montrer des signes d'impatience. En désespoir de cause, beaucoup se sont rabattus sur les cours de soutien privés. C'en était trop. Face à l'impasse, les autorités n'avaient d'autres choix sinon prêter une oreille attentive aux contestataires. Alors qu'il refusait au Cnapest et au CLA le statut d'interlocuteur, leur préférant le syndicat officiel, le ministre Benbouzid a fini par céder. Mais pas sur tout. Les animateurs de la grève sont invités à la table des négociations. Toutefois, ils devront se contenter d'un smig. En quête d'agrément, le Cnapest s'est trouvé face à un mur. Même les députés de l'Assemblée populaire nationale ne lui seront d'aucun secours. Interpellés sur cette affaire, les membres de l'Exécutif n'ont pas fini de se renvoyer la balle. Sans doute par crainte de pourrissement, le CLA et autre Cnapest ont décidé de mettre fin à leur action en janvier. Pour autant, ils n'ont pas abandonné la lutte pour leur reconnaissance et le triomphe de leurs revendications. Obstiné, le Cnapest est redescendu dans l'arène en faisant de la pression sa principale arme. Jus- qu'au-boutisme, il a menacé de boycotter la correction des copies du bac avant de se rétracter à j-1 du début des épreuves. Cette concession aura-elle valeur de bon point ? Le département de Benbouzid en tiendra-t-il compte pour plaider la cause des enseignants au sein du gouvernement. Rien n'est sûr. L'augmentation du taux de réussite au bac semble être sa principale préoccupation. Il est vrai que les moyennes atrophiées soignent l'image du système éducatif. Peu importe la souffrance de ses acteurs. L'énième motif de la désespérance des enseignants a trait à la révision de l'âge de la retraite. Sur ce point d'achoppement et bien d'autres reprendront les hostilités en septembre prochain. En attendant pleins feux sur le bac. 574 564 candidats, 1 673 centres d'examen, 613 millions de dinars de subvention, 94 sujets… sont les chiffres phares de la cuvée 2004. Les résultats seront-ils à la hauteur des espoirs des candidats, de leurs parents et des autorités ? Principale exigence des enseignants et des parents, une session de rattrapage devait être organisée pour compenser les retards et les programmes bâclés. Il était question qu'elle soit institutionnalisée. Il n'en fut rien. Le Chef du gouvernement a dit non à son ministre. S. L.