La corporation reste mobilisée pour la libération de Mohamed Benchicou et de Hafnaoui Ghoul. Ce dernier avait été incarcéré, début juin. Cela fait aujourd'hui un mois déjà que Mohamed Benchicou, directeur du quotidien Le Matin, croupit en prison à la maison d'arrêt d'El-Harrach.Hier, au siège du Matin, tout le personnel affichait sa détermination à aller de l'avant en ne faisant aucune concession par rapport à la ligne éditoriale et se dit plus déterminé qu'avant. “Il est vrai que la première semaine qui a suivi l'incarcération de M. Benchicou a été démoralisante et choquante, mais on a réussi à remonter la pente et nous sommes tous mobilisés pour continuer à informer en accompagnant les forces du progrès. C'est notre premier devoir”, note Samira Imadalou, journaliste. Cependant, la pression continue sur le journal soumis depuis quelques mois à un véritable harcèlement du pouvoir. Hier, Saïda Azzouz a comparu au tribunal d'Alger dans l'affaire Saâdaoui. Ce dernier avait déclaré à travers les colonnes de ce quotidien avoir été torturé, durant les années 1970, par l'actuel ministre de l'Intérieur, Yazid Zerhouni, qui exerçait, à l'époque, au sein du corps des services secrets algériens. La plainte a été déposée par M. Chagra Abdelkader et sa famille contre Saâdaoui et la journaliste qui a rapporté ses propos le traitant de “harki”. “Il est bizarre que cette plainte pour diffamation ait été déposée pour avoir été qualifié de “harki” et non pour avoir été accusé de “tortionnaire”, relève la journaliste. Le parquet cite l'affaire n° 9, et à la surprise des présents, elle concerne Mohamed Benchicou, alors qu'il est en prison. Le directeur du Matin est accusé d'outrage au président de la République. Les deux affaires, requérant la présence du directeur du Matin, ont été reportées au mois de novembre. “Je pense qu'il était extrêmement gênant pour les autorités de déplacer Benchicou au tribunal d'Alger, au moment où le ministre français des Affaires étrangères était l'hôte d'El-Mouradia, d'autant qu'il a été interpellé sur la question de la liberté de la presse”, relève-t-on au niveau de la rédaction. Abla Cherif, journaliste, semble plus que déterminée à aller de l'avant mais reconnaît que “le collectif vit une situation exceptionnelle avec toutes les pressions et menaces qu'il subit actuellement”. “Mais nous sommes conscients et nous tenons bon. Nous restons une équipe soudée qui ira au bout de ses convictions et sans concession aucune”, reprend-elle. Pour sa part, la directrice de la rédaction, Ghania Khelifi, semble “méfiante” quant aux intentions du pouvoir. Elle relève des contradictions, entre les déclarations de bonne intention du ministre de la Communication et la nouvelle condamnation à 3 mois de prison ferme prononcée contre Hafnaoui Ghoul, dimanche dernier. Son inquiétude est d'autant plus grande lorsqu'elle soulève le fait que le collectif des avocats chargé de la défense de Benchicou a informé la direction du Matin que le dossier de l'affaire en appel n'a pas encore été acheminé au tribunal d'Alger. “On ne connaît pas encore la date du procès et le dossier n'est même pas transmis à la Cour d'Alger. Nous attendons dimanche prochain, délai limite prévu par la loi pour le transfert du dossier”, s'inquiète-t-elle. Et d'ajouter : “Nous ne savons pas pour le moment si le retard est dû à des lenteurs administratives ou si c'est fait de manière préméditée. Les jours à venir nous éclairerons vite sur ce point. Mais il reste que nous continuerons à mener le combat et à alerter l'opinion nationale et internationale”. M. B.