Les Algériens attendent légitimement à ce que la hausse extraordinaire des cours du brut se traduise par des avantages sociaux. Les cours du pétrole, qui caracolent au-dessus de la barre des 45 dollars sur le marché mondial, mettent l'eau à la bouche des Algériens. Première ressource en devises du pays et véritable baromètre de la santé financière de l'économie nationale, les fluctuations du prix de l'or noir suscitent invariablement un sentiment d'inquiétude où de béatitude. L'augmentation des cours est, en effet, synonyme, chez nous, d'une aisance financière certaine qui procurerait, théoriquement, des avantages sociaux pour les travailleurs. Inversement, la chute brutale du prix du pétrole fait craindre un désinvestissement pour les entrepreneurs et, par conséquent, le recours aux plans sociaux dans leur entreprise. Et en l'état actuel des cours, on est plutôt dans le premier cas de figure, puisque le brut culmine à un seuil de près de 50 dollars le baril. Les Algériens, attendent donc, légitimement, que cette formidable manne pétrolière change un tant soit peu leurs conditions de vie. Loin de toute arithmétique ou autre analyse d'initié, le simple citoyen revendique sa part du “gâteau” ne serait-ce que par une poignée de dinars supplémentaire dans son escarcelle. S'il est vrai que la destination de l'argent du pétrole n'est pas forcément connue dans un pays rompu à la rapine et aux détournements des deniers publics, le gouvernement est moralement tenu et politiquement interpellé de faire en sorte que cette rente soit utilisée à bon escient et profiter au petit peuple qui en a grandement besoin. Il ne s'agit, bien entendu, pas de distribuer des chèques pour chaque Algérien, mais de stimuler la croissance économique via le lancement des projets créateurs de richesses à même d'absorber les cortèges de chômeurs qui essaiment nos contrées. À 45 dollars le baril, les recettes pétrolières du pays passent du simple au double et les conditions de vie des Algériens devraient au moins s'améliorer. Il est vrai que le président Bouteflika a lancé un plan de relance économique doté de 7 milliards de dollars durant son premier mandat. Il est vrai aussi que beaucoup d'infrastructures socio-éducatives y avaient été construites. Il est néanmoins difficile de faire un évaluation “positive” des résultats de ce programme en terme de création d'emplois ou encore de relance de l'appareil de production. Les chiffres étant sujet à spéculations dans la sphère économique selon que l'on est au pouvoir ou dans l'opposition, il n'existe donc pas d'instruments statistiques fiables pour mesurer les faits et méfaits d'une politique. Il n'est qu'à voir les contradictions cycliques qui accompagnent les notes de conjoncture du CNES coupable, aux yeux des gouvernements, de ramer à contre-courant, pour un organisme censé répercuter les “réalisations” de l'Exécutif. La flambée des cours du pétrole reste, au bout du compte, le seul indicateur de l'opulence nationale aux yeux du travailleur algérien qui réclame des avantages sociaux, histoire de tirer profit d'une rente tombée du ciel. C'est manifestement ce que tente de faire la Centrale syndicale à la veille de la tenue de la bipartite avec le gouvernement, mais aussi et surtout de la rentrée sociale qu'on annonce tendue. Le volume extraordinaire de la cagnotte des hydrocarbures a dû certainement inciter la direction de cet appareil de faire un forcing pour arracher des acquis sociaux dans cette conjoncture ultra-favorable. Il est notamment question de la permanisation de 300 000 fonctionnaires contractuels de la Fonction publique pour lesquels le gouvernement ne semble pas disposé à faire des concessions. C'est d'ailleurs l'une des pierres d'achoppement des travaux de la commission mixte qui a du mal à dégager un consensus. L'UGTA fait de cette revendication une espèce de trophée de guerre à exhiber pour ses troupes dans sa légendaire mission de “pompier”. Le gouvernement, lui, fait preuve d'une fermeté mesurée, mais intelligente, pour ne pas ouvrir d'autres foyers de tension. Il reste que ce dossier de la Fonction publique est de nature à faire flamber la rentrée sociale si tel était le souhait du gouvernement d'abord, par tactique ou carrément de connivence avec la Centrale dont la proximité avec le pouvoir politique n'a jamais été démentie. Bien au contraire. Il ne serait donc pas surprenant de voir les négociateurs de Ouyahia condescendre finalement à permaniser au moins 200 000 fonctionnaires à la veille d'une grève annoncée pour permettre à l'UGTA de retrouver sa mission qui consiste à éteindre le feu dans tous les secteurs en ébullition, pour rendre au gouvernement la monnaie de sa pièce. Quant à la manne pétrolière, les Algériens se frottent les mains quant à l'usage qu'on ferait de la très grosse cagnotte de … 50 milliards de dollars qu'a promis le président Bouteflika pour un autre plan de relance économique. H. M. Rentrée sociale explosive, selon le PT Le Parti des travailleurs (PT) prépare activement sa rentrée politique avec, notamment, la tenue d'assemblées générales. C'est dans cette perspective que le secrétariat politique s'est réuni ce week-end. Cette rencontre a été, par ailleurs, l'occasion pour la formation de Louisa Hanoune de commenter l'actualité. À ce propos, le PT prédit “une rentrée sociale explosive”. Dans un communiqué transmis hier à la rédaction, le parti considère “le plan de privatisation massif, l'utilisation des logements sociaux pour les nouveaux bacheliers, l'augmentation annoncée des produits de consommation” comme les ingrédients de cette explosion. S'exprimant sur la réforme de la Fonction publique, il estime qu'il s'agit là “d'un point de rupture inégalé” qui aura “des retombées gravissimes sur les fonctionnaires”. “Peut-on injecter 50 milliards de dollars dans un plan de relance économique tout en détruisant le patrimoine productif existant et en généralisant la précarité de l'emploi ?”, s'interroge le PT qui se déclare solidaire de tous les travailleurs (cheminots, agroalimentaire…) dont les secteurs d'activité sont menacés.