Les Etats-Unis et les organisations internationales prônaient toujours la fermeté avec Khartoum, avant le verdict du Conseil de sécurité sur le Darfour, tandis que les autorités soudanaises tablent sur la clémence. En tournée au Darfour depuis lundi, la secrétaire d'Etat adjointe aux affaires africaines Constance Newman devait rencontrer hier les responsables soudanais pour les presser de mettre fin à la crise qui secoue depuis dix-huit mois cette région de l'Ouest soudanais, frontalière du Tchad. L'épisode des tergiversations a pris fin : le gouvernement soudanais se doit de tenir la totalité de ses engagements et de répondre à toutes les exigences des Nations unies. Autrement, le Conseil de sécurité décidera d'agir en imposant éventuellement des sanctions, a déjà annoncé le porte-parole de la Maison-Blanche Richard Boucher. Le Conseil de sécurité de l'ONU avait accordé le 30 juillet un délai de trente jours au Soudan, sous peine de prendre des mesures, pour rétablir la sécurité au Darfour, notamment par le désarmement des milices arabes progouvernementales Janjawids, et l'acheminement sans entraves des aides alimentaires aux déplacés. La guerre civile au Soudan a fait entre 30 000 et 50 000 morts depuis février 2003, tandis que 1,5 million de personnes environ sont affectées par une crise humanitaire sans précédent dans le monde, selon les organisations humanitaires internationales. 1,2 million de déplacés sont installés dans des camps de fortune autour des grandes villes du Darfour (El Facher, Geneina et Nyala) et 180 000 se sont réfugiés au Tchad voisin. Les autorités soudanaises affirment avoir bien entamé le programme d'action convenu avec le représentant de l'ONU à Khartoum pour répondre aux exigences du Conseil de sécurité et attendent un verdict de clémence. Le programme est en train d'être réalisé pour assurer plus de sécurité et plus d'aide dans la région. Nous allons réussir et nous voulons faire avec les Nations unies un modèle exemplaire de coopération, n'ont cessé de déclarer les officiels soudanais. Khartoum a considérablement facilité les démarches d'accès au Darfour pour les organisations humanitaires, a déployé près de 10 000 policiers pour sécuriser les camps de déplacés et abaissé de 30% l'état d'alerte parmi les réservistes de l'armée, dont 1 500 ont déjà remis leurs armes aux autorités. Mais, selon l'ONU et les organisations humanitaires, les déplacés ont encore peur de regagner leurs villages malgré les assurances des autorités et restent la proie des Janjawids dès qu'ils s'aventurent autour des camps à la recherche de bois. Un grand nombre de viols a encore été enregistré, selon le Haut-Commissariat des Nations pour les réfugiés (HCR). Par ailleurs, des déplacés et des partis d'opposition soudanais accusent le gouvernement d'avoir converti les Janjawids en policiers et en gardes frontières au lieu de les désarmer, ce que les autorités démentent. Khartoum a également fait savoir que l'UA doit se contenter de son mandat et qu'il n'est pas question de voir le contingent militaire africain augmenter. La force d'imposition africaine est constituée par 300 soldats, alors qu'il faudrait, au bas mot, 3 000 militaires pour sécuriser le Darfour. Le Soudan n'a d'ailleurs pas fini avec ses voisins. Après le Tchad, le feu couve avec l'Erythrée qui accuse Khartoum de promouvoir l'immigration illégale vers l'Occident. Les relations soudano-érythréennes sont tendues depuis plusieurs mois, chaque gouvernement accusant l'autre de soutenir des tentatives de renversement. D. B.